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21 juin 1905

     *Dépôt, par M. Albert Tournier, d’une proposition de loi tendant à ouvrir au ministre de l’agriculture un crédit supplémentaire de 600 000 fr. destiné à venir en aide aux victimes des inondations et de la grêle dans l’arrondissement de Pamiers (Ariège).
    * Dépôt d’un projet de loi ayant pour objet d’approuver une nouvelle prorogation de la réforme judiciaire en Egypte.
    * Adoption d’un projet de loi concernant les réquisitions militaires

suite de la discussion du projet et des diverses propositions de loi
concernant la séparation des Églises et de l'État.
(39° journée ; réduite et annotée)

M. le président :  ... La Chambre s’est arrêté à l’article 20 dont il a été donné lecture et sur lequel un certain nombre d’amendements ont été déposés.
     Le premier de ces amendements est celui de MM. Marc Réville, Léopold Fabre et Albert-Le-Roy, qui proposent de rédiger cet article:
     “Art. 20. - Les associations et unions peuvent  employer leurs ressources disponibles à  la constitution d'un fonds de réserve  dont  le montant global ne pourra dépasser le total des sommes  dépensées  pendant les trois derniers  exercices pour les frais et l'entretien du  culte ( y compris tous traitements nécessaires) .
     “Indépendamment de cette réserve qui devra être placée en valeurs nominatives, elles pourront constituer :
     “1° Une réserve spéciale dont les fonds devront être exclusivement affectés, y compris les intérêts, à l’achat, à la construction, à la décoration ou à la réparation d’immeubles ou meubles destinés aux besoins de l’association ou de l’union;
     “2° Une réserve spéciale dont les fonds devront être déposés à la caisse nationale des retraites, pour être exclusivement affectés, y compris les intérêts, à la constitution des pensions de retraite au profit des vieux ministres et des vieux employés et salariés conservés pendant trente ans au service des associations.
     “les veuves et orphelins des appelés à ces pensions pourront bénéficier de retraites proportionnelles dans les conditions qui seront déterminées entre les associations et leurs ministres, employés et salariés.”

M. Marc Réville : Monsieur le président, permettez-moi de vous faire observer qu’il y a un amendement de MM. Thierry et Ribot, qui est beaucoup plus large que le nôtre.
...
M. le président : je donne alors lecture de cet amendement qui porte les signatures de MM. J. Thierry, Ribot, Renault-Morlière, Paul Beauregard (Seine), Henry Boucher, Camille Krantz, Aynard, Motte, Jules Roche (Ardèche), Raiberti, Drake, Prache, Georges Berger, Déribéré-Desgardes, Dulau, Lebrun, Lefas, Guillain, Julien Goujon, félix Marot, Ballande, Bonnevay, François Carnot, Duclaux-Monteil, Fleury-Ravarin, de Montjou.
     Nos collègues proposent de rédiger ainsi l’article 20 :
     “Les associations et unions peuvent employer leurs ressources disponibles à la constitution d’un fonds de réserve dont le revenu total ne pourra dépasser la moitié de la somme inscrite annuellement au budget ordinaire des frais d’entretien du culte pendant les cinq dernières années.”
...
M. le ministre des cultes :  Il y aurait danger à accepter les chiffres proposés par M. Ribot dans son amendement, à cause de la faculté qui serait donné aux unions de constituer une réserve dont le revenu pourrait atteindre la moitié du budget des cultes actuel (Donc énorme !)

M. Ribot : Si nous sommes d’accord quant au fond, je n’insiste pas sur le chiffre.
...
M. le président :  L’amendement de MM. Marc Réville, Léopold Fabre et Albert-Le-Roy tend à rédiger ainsi le 1er paragraphe ce l’article 20 :
     “Les associations et unions peuvent  employer leurs ressources disponibles à  la constitution d'un fonds de réserve  dont  le montant ne pourra dépasser le triple de la moyenne annuelle des sommes  dépensées  pendant les cinq derniers  exercices pour les frais et l'entretien du  culte dans la circonscription religieuse intéressée“.
...
M. le ministre des cultes : Le Gouvernement accepterait la solution proposée par l’honorable M. Réville. Je crois que cette proposition donnerait une satisfaction suffisante aux besoins des petites paroisses sans présenter le danger qu’une réserve plus considérable créerait incontestablement.
...
M. le président : Le premier texte que j’avais lu de l’amendement de M. Marc Réville, contenait des dispositions s’éloignant en effet beaucoup plus de celles de la commission que la plupart des autres amendements. M. Réville a simplifié son amendement. Le nouveau texte, s’il était adopté, rendrait inutile la discussion des autres amendements.
     Je donne lecture de ces autres amendements.
     C’est d’abord un amendement de MM. Rose, Georges Grosjean, Amédée Reille et Ballande, qui tend à modifier comme suit le premier paragraphe de l’article 20 :
     “Les associations et union peuvent employer leurs ressources disponibles à la constitution d’un fonds de réserve suffisant pour assurer les frais et l’entretien du culte et ne pouvant en aucun cas recevoir une autre destination ; le montant de cette réserve ne pourra jamais dépasser une somme supérieure, pour les unions, à quatre fois, et, pour les associations, à dix fois la moyenne annuelle des sommes dépensées par chacune d’elles pour les frais du culte pendant les cinq derniers exercices.”
...
     Il y avait encore un amendement de M. Auffray, ainsi conçu :
     “Dans les circonscription religieuses dont les associations cultuelles auront dépensé en moyenne, pendant les cinq derniers exercices, une somme maxima de 3 000 fr., les ressources disponibles pourront servir à la constitution d’un fonds de réserve dont le revenu ne pourra dépasser les trois cinquième de la dépense annuelle.
     “Dans les autres associations cultuelles et dans les unions, le revenu de la réserve ainsi constitué ne pourra dépasser 5p. 100 de la dépense moyenne annuelle.
     “Lorsque les réserves ainsi constituées dépasseront le quantum ci-dessus fixé, le surplus sera versé de droit à la réserve spéciale prévue par le premier paragraphe du présent article.”

    Sur de nombreux bancs :  Au voix ! Le renvoi en commission.

M. Le président : Je consulte la Chambre sur le renvoi à la commission des amendements de MM. Ribot, Réville, Rose et Auffray.
(Renvoi adopté par 298 voix contre 275 ; la commission obtient une suspension de séance pour pouvoir délibérer)
...
M. Aristide Briand rapporteur : ... la commission ... a repoussé l’amendement de l’honorable M. Ribot et celui de l’honorable M. Auffray. Ayant à se prononcer ensuite sur l’amendement de M. Rose, la commission a été mise dans l’impossibilité de prendre une résolution : elle s’est partagé en deux parties égales ; c’est à dire que la Chambre se trouve en présence du premier texte de la commission, et qu’elle reste l’arbitre de la situation.

M. le président : L’amendement de MM. Rose, Grosjean, Reille et Ballande tendait à ce que le montant de la réserve ne pût jamais dépasser une somme supérieure, pour les unions et associations ayant plus de 5 000 fr. de revenu, à quatre fois la moyenne annuelle, et, pour les autres associations, à dix fois la moyenne annuelle.

M. Rose : A titre de transaction, je propose de porter la réserve disponible que pourront se constituer les associations à trois fois et six fois la moyenne de leurs dépenses annuelles au lieu de quatre fois à dix fois.
     Je tiens essentiellement à faire consacrer le principe qui consiste à permettre aux petites paroisses de se créer une réserve plus importante que celle des unions et des grandes associations. Je demande à la Chambre de bien vouloir accepter notre amendement. (Très bien ! très bien!)
...
M. le ministre des cultes : ... L’amendement de M. Réville  nous a paru offrir des facilités suffisantes aux petites paroisses pour faire face à leurs dépenses annuelles. L’amendement de M. Rose va bien au delà. C’est pourquoi le Gouvernement ne peut y donner son adhésion.

M. Le président :  je mets aux voix le nouvel amendement de MM. Rose, Grosjean, Amédée Reille et Ballande, qui tend à rédiger ainsi le 1er paragraphe de l’article 20 :
     “Les associations et unions peuvent employer leurs ressources disponibles à la constitution d'un fonds de réserve suffisant pour assurer les frais et l'entretien du culte et ne pouvant, en aucun cas, recevoir une autre destination ; le montant de cette réserve ne pourra jamais dépasser une somme égale, pour les unions et associations ayant plus de 5 000 fr. de revenu, à trois fois et, pour les autres associations, à six fois la moyenne annuelle des sommes dépensées par chacune d'elles pour les frais du culte pendant les cinq derniers exercices.”
(Adopté par la Chambre des député  par 294 voix contre 279)
     Le texte de cet amendement formera le premier paragraphe de l’article 20. Les autres amendements portant sur le paragraphe 1er tombent.
     M. Lemire a présenté un amendement dont la partie portant sur le même paragraphe tombe également, mais la seconde partie ferait l’objet d’une disposition additionnelle à inscrire à la suite de ce paragraphe 1er.
     Cette disposition est ainsi conçue :
     “Ce fonds de réserve devra être placé en biens-fonds ou en valeurs nominatives françaises.”
...
(Amendement repoussé par 335 voix contre 152)
     Nous passons au deuxième paragraphe de l’article 20, qui est ainsi conçu:
     “Indépendamment de cette réserve, qui  devra être placée en valeurs nominatives,  elles pourront constituer une réserve  spéciale dont les fonds devront êtres  déposés à la Caisse des dépôts et  consignations pour  être exclusivement  affectés, y compris les intérêts, à l'achat,  à la construction, à la décoration ou à la  réparation d'immeubles ou meubles  destinés aux besoins de l'association ou  de l'union.”
     M. Lerolle, par voie d’amendement, demande la suppression des mots : “devront êtres  déposés à la Caisse des dépôts et  consignations pour  être exclusivement  affectés...”
     Le texte de ce deuxième paragraphe serait donc conçu :
     “Indépendamment de cette réserve, qui  devra être placée en valeurs nominatives,  elles pourront constituer une réserve  spéciale dont les fonds seront exclusivement  affectés, y compris les intérêts, à l'achat,  à la construction, à la décoration ou à la  réparation d'immeubles ou meubles  destinés aux besoins de l'association ou  de l'union.”
...
M. le rapporteur :  La commission accepte qu’on inscrive après le membre de la phrase “devront être déposés”, les mots “en argent ou en titres nominatifs”. L’essentiel est que le dépôt soit fait à la caisse des dépôts et consignations.

M. Paul Lerolle :  Dans ces conditions, et sans rien retirer de mes critiques sur l’obligation du dépôt, comme j’ai une satisfaction partielle importante, je dois m’en contenter et je retire mon amendement.
...
M. le président : La fin du deuxième paragraphe serait ainsi rédigée :
     “ Indépendamment de cette réserve, qui devra être placée en valeurs nominatives, elles pourront constituer une réserve spéciale dont les fonds devront êtres déposés, en argent ou en titres nominatifs, à la Caisse des dépôts et consignations pour  être exclusivement affectés, y compris les intérêts, à l'achat, à la construction, à la décoration ou à la réparation d'immeubles ou meubles destinés aux besoins de l'association ou de l'union.”
     Je le mets aux voix
(Le deuxième paragraphe, mis aux voix est adopté.)
     Nous passons à la seconde partie de l’amendement de MM. Marc Réville, Léopold Fabre et Albert-le-Roy, qui constituaient une disposition additionnelle ainsi conçue :
 “Une réserve spéciale dont les fonds devront être déposés à la caisse nationale des retraites, pour être exclusivement affectés, y compris les intérêts, à la constitution des pensions de retraite au profit des vieux ministres et des vieux employés et salariés conservés pendant trente ans au service des associations.
 “Les veuves et orphelins des appelés à ces pensions pourront bénéficier de retraites proportionnelles dans les conditions qui seront déterminées entre les associations et leurs ministres, employés et salariés.”

M. Marc Réville : je serais obligé à M. le rapporteur de vouloir bien déclarer, avec l’autorité qui lui appartient, que les caisses de retraite qui existent actuellement pour les ministres des cultes continueront à exister. ... Mon amendement serait inutile si l’application pure et simple de la législation actuelle me donnait satisfaction et continuait à être en vigueur pour l’avenir.
....
M. le président :   L’amendement de M. Réville est retiré (ainsi que celui de M. Henry Boucher)
     Je mets aux voix l’ensemble de l’article 20.
(L’article 20, mis aux voix, est adopté)

     “Art. 21.- Seront passibles d'une amende de 16   à 200 fr., et d'un emprisonnement de six  jours à trois mois , ou de l'une de ces  deux peines, les directeurs ou  administrateurs d'une association ou  d'une union qui auront contrevenu aux  articles 16, 17, 18, 19 et 20.
    Les tribunaux pourront, dans le cas  d'infraction au paragraphe 1er de l'article  20, condamner l'association ou l'union à  verser à l'État l'excédent constaté par le  contrôle financier.
     Ils pourront, en outre, dans tous les  cas prévus au paragraphe 1er du présent  article, prononcer la dissolution de  l'association ou de l'union”
...
Sur divers bancs: A demain !
 

©Maurice Gelbard
9, chemin du clos d'Artois
91490 Oncy sur École
ISBN 2 - 9505795 -2 - 3