* Suite de la discussion du projet de loi et
de la proposition de loi concernant la fraude sur les vins et le régime
des spiritueux.
* Suite de la discussion des interpellations
1° de M. Jules-Louis
Bretons sur le fonctionnement des établissements congréganistes
d'assistance ;
2° de M. Laffere sur
les mesures que le Gouvernement compte prendre pour mettre fin à
l'exploitation de l'enfance dans certains établissements de bienfaisance.
* Discussion de l'interpellation de M. Rouanet sur
les actes de cruauté commis dans nos possessions par les fonctionnaires
du département des colonies.
* Discussion de l'interpellation de M. Gauthier
(de Clagny) sur la nécessité de réviser les lois constitutionnelles
pour permettre la réalisation plus rapide des réformes politiques,
économiques et sociales promises à la démocratie.
...
M. le président : ... La Chambre a voté hier l'article
15 et je l'ai informée qu'il y avait des dispositions additionnelles,
proposées par MM. Grosjean et berger, d'une part, par M. Aynard
de l'autre, qui feraient l'objet d'un article 15 bis
M. Grosjean me fait connaître qu'il rédige
ainsi la disposition qu'il propose :
"Dans le cas où la
vente ou l'échange d'un objet classé serait autorisé
par le ministre de l'instruction publique et des beaux-arts, un droit de
préemption est accordé : 1° aux associations cultuelles
; 2° aux communes ; 3° aux départements ; 4° aux musées
et sociétés d'art et d'archéologie ; 5° à
l'État. Le prix sera fixé par trois experts que désigneront
le vendeur, l'acquéreur et le président du tribunal civil
"Si aucun des acquéreurs
visés ci-dessus ne fait usage du droit de préemption la vente
sera libre ; mais il est interdit à l'acheteur d'un objet classé
de le transporter hors de France.
"Toute infraction aux dispositions ci-dessus
ainsi qu'à celles de l'article 15 et des articles 11, 12 et
13 de la loi du 30 mars 1887 sera punie d'une amende de 100 à 10
000 fr. et d'un emprisonnement de six jours à trois mois, ou de
l'une de ces deux peines seulement."
...
M. Aynard : Je retire l'amendement que j'avais déposé
et je me rallie à celui de M. Grosjean.
...
M. Grosjean : Messieurs,
que la loi du 30 mars 1887 soit inefficace, je crois que personne n'y peut
contredire. Classés ou non, les objets mobiliers sont audacieusement
et impunément enlevés à leur destination publique
pour entrer dans des collections particulières ou pour disparaître
à l'étranger.
Notre honorable collègue M. Aynard vous contait
hier le hasard qu'avait couru la maison des Ménétriers de
Reims, vendue 100 000 fr. pour être transportée et reconstruite
pierre par pierre en Amérique.
...
La loi italienne de 1902 est infiniment plus prévoyante.
Elle a décidé qu'une personne morale ne pouvait jamais aliéner
au profit d'un particulier ses monuments, ses collections ou les objets
mobiliers de grand prix, sommo pregio. Le ministre peut seul autoriser
la vente ou l'échange, à la condition que l'acquéreur
soit une autre personne morale. Et encore l'État a-t-il le droit
de préemption.
....
En 1832, Victor Hugo réclamait "une loi pour
les monuments, une loi pour l'art, une loi pour la nationalité de
la France, une loi pour les souvenirs, une loi pour les cathédrales,
une loi pour les plus grands produits de l'intelligence, une loi pour l'œuvre
collective de nos père, une loi pour l'histoire, une loi pour l'irréparable
qu'on détruit, une loi pour ce qu'une nation a de plus sacré
après l'avenir : une loi pour le passé"
"Cette loi, ajoutait-il, juste, bonne, excellente,
saine, utile, indispensable, urgente, on ne l'a pas, on ne la fera pas."
Victor Hugo avait en partie raison. Nos prédécesseur
de 1887 ont tenté cette œuvre ; mais, par timidité et sous
l'empire de scrupules juridiques excessifs, ils l'ont manquée.
...
M. le ministre des cultes : ... Il faut étendre
les sanctions pénales proposées par M. Grosjean aux infractions
concernant les immeubles ; il y aurait donc lieu d'ajouter l'article 4
de la loi de 1887 aux textes visés par M. Grosjean.
...
M. Grosjean : ... , dans le texte primitif de l'amendement
que j'ai déposé, j'avais inséré ce paragraphe
:
" Nul travail de réparation,
restauration ou entretien à faire aux monuments ou objets mobiliers
classé ne peut être commencé sans l'autorisation du
ministres des beaux-arts, ni exécuté hors la surveillance
de son administration, sous peine, contre les propriétaires, occupants
ou détenteurs qui auraient ordonné ces travaux, d'une amende
de 16 à 1 500 fr."
Je répondrai, je crois, parfaitement
aux intentions de M. le ministre et aux préoccupations de la Chambre
en demandant l'insertion de cette disposition dans le texte nouveau que
j'ai remis au commencement de la séance à M. le président.
(Très
bien ! très bien ! au centre et sur divers bancs à gauche.)
...
M. le président : Voici comment serait rédigé
l'amendement :
"Dans le cas où
la vente ou l'échange d'un objet classé serait autorisé
par le ministre de l'instruction publique et des beaux-arts, un droit de
préemption est accordé : 1° aux associations cultuelles
; 2° aux communes ; 3° aux départements ; 4° aux musées
et sociétés d'art et d'archéologie ; 5° à
l'État. Le prix sera fixé par trois experts que désigneront
le vendeur, l'acquéreur et le président du tribunal civil
"Si aucun des acquéreurs
visés ci-dessus ne fait usage du droit de préemption la vente
sera libre ; mais il est interdit à l'acheteur d'un objet classé
de le transporter hors de France.
" Nul travail de réparation,
restauration ou entretien à faire aux monuments ou objets mobiliers
classé ne peut être commencé sans l'autorisation du
ministres des beaux-arts, ni exécuté hors la surveillance
de son administration, sous peine, contre les propriétaires, occupants
ou détenteurs qui auraient ordonné ces travaux, d'une amende
de 16 à 1 500 fr."
"Toute infraction aux dispositions ci-dessus
ainsi qu'à celles de l'article 15 et des articles 4, 11, 12
et 13 de la loi du 30 mars 1887 sera punie d'une amende de 100 à
10 000 fr. et d'un emprisonnement de six jours à trois mois, ou
de l'une de ces deux peines seulement."
M. le ministre des cultes : Je ne vois pas qu'il soit fait mention dans la rédaction nouvelle des immeubles par destination.
M. Jean Cruppi : ..., on pourrait mettre
en tête de l'article un paragraphe ainsi conçu : " Les immeubles
par destination, classés en vertu de la loi du 30 mars 1887, sont
inaliénables et imprescriptibles.
...
M. Le président : Je mets aux voix
le texte formé par ces divers dispositions qui forment l'amendement
de MM. Grosjean, Berger et Aynard.
(Ce texte,
mis aux voix, est adopté)
M. Rouanet propose un paragraphe
additionnel ... ainsi conçu :
"
La visite des édifices et l'exposition des objets mobiliers classés
seront publiques : elles ne pourront donner lieu à aucune taxe ni
redevance obligatoire."
Pourquoi
le mot "obligatoire" ?
(La suppression du mot est acceptée
; un premier vote, à main levée sur ce texte est déclaré
douteux par le bureau. Un scrutin est ouvert et la paragraphe additionnel
est adopté par 338 voix contre 250.)
Je mets aux voix l'ensemble
de l'article 15 bis, en ces termes :
"Art. 15 bis. - Les immeubles par destination classés en vertu
de la loi du 30 mars 1887 ou de la présente loi sont inaliénables
et imprescriptibles
"Dans le cas où la vente
ou l'échange d'un objet classé serait autorisé par
le ministre de l'instruction publique et des beaux-arts, un droit de préemption
est accordé : 1° aux associations cultuelles ; 2° aux communes
; 3° aux départements ; 4° aux musées et sociétés
d'art et d'archéologie ; 5° à l'État. Le prix
sera fixé par trois experts que désigneront le vendeur, l'acquéreur
et le président du tribunal civil
" Si aucun des acquéreurs visés
ci-dessus ne fait usage du droit de préemption la vente sera libre
; mais il est interdit à l'acheteur d'un objet classé de
le transporter hors de France.
"Nul travail de réparation, restauration
ou entretien à faire aux monuments ou objets mobiliers classé
ne peut être commencé sans l'autorisation du ministres des
beaux-arts, ni exécuté hors la surveillance de son administration,
sous peine, contre les propriétaires, occupants ou détenteurs
qui auraient ordonné ces travaux, d'une amende de 16 à 1
500 fr.).
"Toute infraction aux dispositions ci-dessus
ainsi qu'à celles de l'article 16 de la présente loi et des
articles 4, 10, 11, 12 et 13 de la loi du 30 mars 1887 sera punie d'une
amende de 100 à 10 000 fr.) et d'un emprisonnement de six jours
à trois mois, ou de l'une de ces deux peines seulement.
"La visite des édifices et
l'exposition des objets mobiliers classés seront publiques : elles
ne pourront donner lieu à aucune taxe ni redevance."
(L'ensemble de l'article 15
bis,
mis aux voix, est adopté.)
Nous passons à l'article
suivant, pour lequel la commission propose une nouvelle rédaction
qui a été distribuée :
Titre IV
Des associations pour l'exercice
des cultes
"Art. 16.- Les associations
formées pour subvenir aux frais, à l'entretien et à
l'exercice public d'un culte devront être constituées conformément
aux articles 5 et suivants du titre Ier de la loi du 1er juillet 1901.
Elles seront, en outre, soumises aux prescriptions de la présente
loi."
(MM.
Réveillaud et ses amis, M. Ferdinand Buisson et M. Georges Grosjean
qui avaient déposé des amendements les retirent)
...
M. Gayraud :
Je
n'ai aucune objection à faire contre la première phrase de
l'article 16. J'admets très bien que des associations formées
pour subvenir aux frais d'un culte doivent être constituées
conformément aux articles 5 et suivant du titre 1er de la loi du
1er juillet 1901.
C'est à propos de la
second phrase : "Elles seront en outre soumises aux prescriptions de la
présente loi", que je tiens à présenter quelques observations
à la Chambre avant qu'elle ne passe au vote de cet article.
...
Je ne voudrais pas que le
vote de l'article 17 pût attirer sur votre loi ... une condamnation
semblable à celle qui a frappé la constitution civile du
clergé de 1791. Vous le comprenez bien, s'il en était ainsi,
vous poursuivriez en vain, par rapport à nous catholiques, le vote
de cette loi, car dès maintenant vous iriez contre vos déclarations
les plus formelles, vous ne feriez pas une loi acceptable pour l'Église
catholique.
Il faut que vous sachiez,
messieurs, que la constitution de l'Église catholique n'est pas
une constitution démocratique.
M. Aubry : Nous nous en doutions.
M. Bepmale : Nous le savions depuis longtemps.
M. Gayraud : Ce qui ne veut pas dire qu'elle
n'aime pas la démocratie
...
M. Gayraud : ... La constitution de l'Église
catholique est monarchique. Il s'ensuit que vous ne pouvez pas introduire,
à son insu, dans son organisation un principe démocratique
qui vous exposerait à un désaveu et à une condamnation...
(Interruptions
à gauche et à l'extrême gauche.)
...
... L'autorité ecclésiastique
est souveraine non seulement dans l'enseignement, dans l'administration
des sacrements, mais encore, de par le droit constitutif de l'Église,
dans l'administration du temporel.... ce n'est pas à dire
que, dans certains cas, l'Église n'ait accepté de partager
l'administration du temporel avec des laïques ; mais il faut que vous
sachiez que cela a été l'effet d'une concession de la puissance
ecclésiastique.
M. Aubry : Quand elle ne pouvait pas faire autrement.
M. Balitrand : Par extraordinaire.
...
M. Gayraud : La loi que nous faisons intéresse-t-elle
l'Église, oui ou non, mes chers collègues ? Si elle intéresse
l'Église, j'ai le droit de dire ce que l'Église en pense.
...
En nous plaçant à
ce point de vue, lorsque vous légiférez ou menacez de légiférer
et d'imposer à l'Église une certaine organisation des paroisses,
en vertu de laquelle vous ferez passer au nom de la puissance civile, l'administration
du temporel des paroisses, entre les mains des laïques, vous commettrez
un empiétement sur la puissance spirituelle, vous vous ingérez
dans un domaine qui n'est pas le vôtre. (Exclamations à
l'extrême gauche) et vous exposez purement et simplement à
ce que l'autorité spirituelle interdise aux associations cultuelles
de se constituer de cette manière. (Nouvelles exclamations à
gauche.- Très bien ! très bien ! sur divers bancs à
droite.)
...
Si c'est cela que vous
voulez dites-le ; je ne demande pas mieux. Mais alors je me tournerai du
côté du Gouvernement et je lui dirai : Qu'il soit bien entendu
que la loi que vous faites n'est pas acceptable pour l'Église catholique.
...
M. le rapporteur : Il faut dire
en quoi elle n'est pas acceptable.
M. Balitrand : Toutes les lois doivent être acceptées par tous les citoyens français.
M. Gayraud : Vous savez, monsieur Balitrand, qu'il y a des lois que l'Église catholique n'accepte et n'acceptera jamais ... (Exclamations à l'extrême gauche.)
M. Balitrand : Il serait bon que le pays connusse ces paroles !
M. Gayraud : ... parce qu'au dessus de
la loi nous mettons la justice et la conscience religieuses.
(Applaudissements
à droite.- Vives interruptions à l'extrême gauche et
sur divers bancs de la gauche.)
...
... si je prends le
texte de la commission, j'y vois d'abord que les associations cultuelles
devront être composées d'un certain nombre de personnes. Le
premier texte portait que ces associations seront composées de sept
personnes. Je n'avais point songé à m'élever contre
ce texte, parce que l'Église a accepté depuis longtemps de
constituer des conseils de fabrique avec un nombre déterminé
de personnes. Mais aujourd'hui vous aggravez singulièrement la loi.
D'abord, vous maintenez le chiffre de sept membres pour les communes de
moins de 1000 habitants ; puis vous adoptez le chiffre de quinze pour les
communes de 1000 à 20 000 habitants et celui de 25 pour celles dont
la population dépasse 25 000 habitants. Je vous avertis que cette
réglementation du nombre des membres de nos associations pourrait
bien se heurter au refus de l'autorité religieuse, parce que vous
empiétez sur son domaine.
M. le rapporteur : C'est qu'alors l'Église
catholique n'acceptera de faire à la France des concessions qu'elle
a faites à d'autres pays sur les mêmes points.
Je constate que sa doctrine
inflexible en France ne s'est pas partout montré aussi intransigeante.
...
M. Jules Coutant (Seine) : Nous demandons
l'affichage du discours de M. Gayraud. (Interruptions et bruit à
droite)
M. Gayraud : ... Vous, société civile, État laïque, vous voulez imposer à l'autorité religieuse, au moment même où vous vous séparez d'elle, des conditions d'organisation intérieure qu'elle est en droit de ne pas recevoir de vous. ... Je n'avais aucune objection à faire sur le texte primitif de la commission ; je vous ai dit pourquoi : parce qu'en France l'Église catholique, le Saint Siège a accepté depuis longtemps une organisation dans laquelle les laïques, au nombre de sept ou huit, jouent un rôle dans l'administration paroissiale.
M. le rapporteur : Dorénavant, les femmes elles-mêmes y seront admises ; on peut donc multiplier par deux le nombre des membres des associations cultuelles.
M. Gayraud : Pas de plaisanterie !
M. le rapporteur : Je ne plaisante pas. En vertu de l'article 17, non seulement les hommes mais encore les femmes majeures, domiciliées et résidant dans la circonscription religieuse, peuvent faire partie de l'association. C'est une faculté dont vous devez tenir compte.
M. Gayraud : ... je vous répète
que, eussiez-vous mille fois raison, ..., de nous demander de voter
une pareille mesure, eussiez-vous conçu l'administration de la paroisse
mieux que l'Église catholique ne l'a jamais organisé nulle
part, de quel droit vous, société civile, vous État
laïque, voulez-vous imposer votre manière de voir à
l'autorité religieuse dans un domaine qui n'est pas le vôtre.
C'est là toute la difficulté
; votre texte ne pourra être acceptable par nous qu'autant qu'il
aura été accepté par le Saint-Siège ; voilà
mon argumentation. (Exclamations ironiques à gauche.)
M. le président : La liberté de discussion veut qu'on entende tout.
M. Jules Coutant (Seine) : On ne peut laisser faire des lois françaises par des étrangers.
M. Gayraud : Encore une fois je ne
dis pas que le Saint-Siège n'acceptera pas cette organisation, je
n'en sais rien, mais ... vous outrepassez vous droits ...
Je passe à un
autre point. Vous dites dans votre texte : "les associations ne pourront
inscrire dans leurs statuts aucune clause tendant à exclure l'assemblée
générale de leurs membres de la participation à l'administration
légale des bien".
M. le rapporteur : C'est naturel.
M. Gayraud : Je ne dis pas que cela ne
soit pas naturel, je dis simplement que vous intervenez dans un domaine
qui n'est pas le vôtre. Voilà tout ce que je veux dire. Je
comprends très bien, monsieur Buisson, que vous ne puissiez pas
admettre ma thèse. Il est évident que l'esprit catholique
est un peu différent en cela de l'esprit des Églises réformées.
Voilà pourquoi j'insistait tout à l'heure en vous disant
que l'Église catholique est une société à constitution
monarchique et non une société à constitution démocratique.
...
C'est tout ce que je
voulais dire à la Chambre. Si la commission, le Gouvernement et
la Chambre jugent bon de passer outre, soit, qu'ils le fassent.
A l'extrême gauche. C'est bien ce
que nous ferons.
...
Si vous voulez aller au schisme,
faire constitution civile du clergé, ouvrir une ère de difficulté
et d'agitation religieuse, faites-le. Quant à moi je ne m'y associerai
point et je proteste dès maintenant contre votre tyrannie. (Applaudissement
à droite.)
M. le président : Il n'y plu d'observation
sur l'article 16 ?
...
Je donne une nouvelle lecture
de l'article 16 avant de le mettre aux voix :
...
(L'article 16, mis aux voix, est adopté.)
Nous passons à l'article
17.
"Art. 17.- Ces associations devront avoir exclusivement pour objet l'exercice
d'un culte et être composés au moins :
"Sept membres Dans les communes
de moins de 1.000 habitants ;
"Quinze membres dans les communes
de 1.000 à 20.000 habitants;
"Vingt-cinq membres dans les communes
dont le nombre des habitants est supérieur à 20.000 ;
"Les personnes composant les associations
devront être majeures, domiciliées ou résidant dans
la circonscription religieuse.
"Les associations ne pourront inscrire
dans leurs statuts aucune clause tendant à exclure l'assemblée
générale de leurs membres de la participation à l'administration
légale des biens.
"Elles pourront recevoir, en outre, des
cotisations prévues par l'article 6 de la loi du 1er juillet 1901,
le produit des quêtes et collectes pour les frais du culte, percevoir
des rétributions : pour les cérémonies et services
religieux même par fondation ; pour la location des bancs et sièges
; pour la fourniture des objets destinés au service des funérailles
dans les édifices religieux et à la décoration de
ces édifices.
"Elles pourront verser, sans donner lieu
à perception de droits, le surplus de leurs recettes à d'autres
associations constituées pour le même objet.
" Elles ne pourront, sous quelque forme
que ce soit, recevoir des subventions de l'État, des départements
et des communes."
Les cinq premiers alinéas
peuvent être considéré comme constituant le premier
paragraphe de l'article.
...
M. Ribot reprend l'ancien
texte de la commission.
Tout d'abord je dois appeler
un certain nombre d'amendements sur le premier paragraphe de l'article
17
Le premier est de M. Buisson
...
qui tend à introduire un paragraphe 1er qui serait ainsi conçu
:
"Ces associations devront
être ouvertes à tous ceux qui rempliront les conditions d'admission
prévues par les statuts.
"En cas de contestation relative,
soit à l'inscription ou à la radiation de membres de l'association,
soit à l'exécution des statuts, il sera pourvu au règlement
du litige par le tribunal civil du ressort."
(Il s'en suit un long débat sur ce
que les laïques entendent par catholiques, par Église catholique
et par catholicisme)
...
M. Lemire : Sommes-nous dans un concile
? (bruit à gauche. - Très bien ! très bien ! à
droite.) Comment peut-on parler de ces choses devant cette Chambre
?
M. le président : Écoutez l'orateur, monsieur Lemire. Tout à l'heure je trouvais malséant qu'on interrompit M. Gayraud ; je trouve tout aussi mauvais qu'on interrompe M. Buisson qui a le droit d'exposer ses idées : ce ne sont certainement pas les vôtres.
M. Lemire : je voudrais avoir les pouvoirs
de Rome pour répondre. (Très bien ! très
bien ! à droite.)
...
M. Ferdinand
Buisson : Le plus illustre orateur
catholique de cette chambre l'a dit il y a longtemps : "La lutte est entre
la Révolution et la contre-révolution menée par le
Syllabus". C'est toujours vrai. ... à moins qu'un jour ne
vienne où l'un des deux adversaires aura été gagné,
éclairé, persuadé, convaincu par l'autre et où
le combat cessera faute de combattants. (Exclamations ironiques à
droite.) Mais en attendant, je dis que nous ne perdons pas notre temps,
que nous n'avons pas pas fait une besogne vaine et verbale en nous disputant
le terrain pied à pied. En ce moment, le tout petit coin de ce vaste
terrain sur lequel je demande à nos amis républicains de
se concentrer dans une opération énergique, est le suivant
: ne pas permettre que l'association cultuelle, quelle qu'elle soit et
avec quelques statuts qu'elle opère, devienne, au lieu d'une association
catholique, un comité clérical, au lieu d'une société
ouverte, une coterie fermée. (Exclamations à droite.)
Je demande que ces
associations auxquelles nous faisons l'attribution de biens si considérables
se constituent conformément à leur objet pour servir les
intérêts du culte et non pour autre chose.
Messieurs, donner ce caractère
aux associations cultuelles catholiques, bien loin d'être un acte
de malveillance à l'égard du clergé, c'est le meilleur
moyen d'encourager ... les prêtres amis de la paix et
uniquement préoccupés de la religion. J'aime à croire
qu'ils sont encore très nombreux. L'influence qu'ils doivent chercher
et que vous devez chercher pour eux ... c'est une influence religieuse
et non politique. A se mettre au service d'un parti politique, ils ne peuvent
faire qu'une œuvre étroite et mesquine, qui n'est pas en conformité
avec leur ministère.
Inscrivons dans la loi une
disposition qui leur permettra de répondre à des politiciens
trop exigeants, trop indiscrets, s'il s'en rencontre, qui veuillent s'emparer
de la petite association cultuelle pour en faire leur chose et leur instrument
: "je ne puis m'y prêter, la loi ne me permet pas de choisir les
uns et d'exclure les autres, mon association est ouverte à des catholiques
de toute nuance et de toute opinion ; je me dois à mes paroissiens,
je suis pasteur de tous et non agent électoral de quelques uns."
...
(L'amendement de M. Buisson sera repoussé
par 526 voix contre 42, ainsi que celui de M. Ribot par 309 voix contre
257. La suite de la discussion sera reportée
à une date ultérieure.)
©Maurice Gelbard
9, chemin du clos d'Artois
91490 Oncy sur École
ISBN 2 - 9505795 -2 - 3