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15 juin 1905

     * Suite de la discussion du projet de loi et de la proposition de loi concernant la fraude sur les vins et le régime des spiritueux.
    * Suite de la discussion des interpellations
        1° de M. Jules-Louis Bretons sur le fonctionnement des établissements congréganistes d'assistance ;
        2° de M. Laffere sur les mesures que le Gouvernement compte prendre pour mettre fin à l'exploitation de l'enfance dans certains établissements de bienfaisance.
    * Discussion de l'interpellation de M. Rouanet sur les actes de cruauté commis dans nos possessions par les fonctionnaires du département des colonies.
    * Discussion de l'interpellation de M. Gauthier (de Clagny) sur la nécessité de réviser les lois constitutionnelles pour permettre la réalisation plus rapide des réformes politiques, économiques et sociales promises à la démocratie.
    ...

suite de la discussion du projet et des diverses propositions de loi
concernant la séparation des Églises et de l'État.
(36° journée ; réduite et annotée)

M. le président : ... La Chambre a voté hier l'article 15 et je l'ai informée qu'il y avait des dispositions additionnelles, proposées par MM. Grosjean et berger, d'une part, par M. Aynard de l'autre, qui feraient l'objet d'un article 15 bis
    M. Grosjean me fait connaître qu'il rédige ainsi la disposition qu'il propose :
    "Dans le cas où la vente ou l'échange d'un objet classé serait autorisé par le ministre de l'instruction publique et des beaux-arts, un droit de préemption est accordé : 1° aux associations cultuelles ; 2° aux communes ; 3° aux départements ; 4° aux musées et sociétés d'art et d'archéologie ; 5° à l'État. Le prix sera fixé par trois experts que désigneront le vendeur, l'acquéreur et le président du tribunal civil
   "Si aucun des acquéreurs visés ci-dessus ne fait usage du droit de préemption la vente sera libre ; mais il est interdit à l'acheteur d'un objet classé de le transporter hors de France.
  "Toute infraction aux dispositions ci-dessus ainsi qu'à celles de l'article 15  et des articles 11, 12 et 13 de la loi du 30 mars 1887 sera punie d'une amende de 100 à 10 000 fr. et d'un emprisonnement de six jours à trois mois, ou de l'une de ces deux peines seulement."
...
M. Aynard : Je retire l'amendement que j'avais déposé et je me rallie à celui de M. Grosjean.
...
M. Grosjean : Messieurs, que la loi du 30 mars 1887 soit inefficace, je crois que personne n'y peut contredire. Classés ou non, les objets mobiliers sont audacieusement et impunément enlevés à leur destination publique pour entrer dans des collections particulières ou pour disparaître à l'étranger.
    Notre honorable collègue M. Aynard vous contait hier le hasard qu'avait couru la maison des Ménétriers de Reims, vendue 100 000 fr. pour être transportée et reconstruite pierre par pierre en Amérique.
...
    La loi italienne de 1902 est infiniment plus prévoyante. Elle a décidé qu'une personne morale ne pouvait jamais aliéner au profit d'un particulier ses monuments, ses collections ou les objets mobiliers de grand prix, sommo pregio. Le ministre peut seul autoriser la vente ou l'échange, à la condition que l'acquéreur soit une autre personne morale. Et encore l'État a-t-il le droit de préemption.
....
    En 1832, Victor Hugo réclamait "une loi pour les monuments, une loi pour l'art, une loi pour la nationalité de la France, une loi pour les souvenirs, une loi pour les cathédrales, une loi pour les plus grands produits de l'intelligence, une loi pour l'œuvre collective de nos père, une loi pour l'histoire, une loi pour l'irréparable qu'on détruit, une loi pour ce qu'une nation a de plus sacré après l'avenir : une loi pour le passé"
    "Cette loi, ajoutait-il, juste, bonne, excellente, saine, utile, indispensable, urgente, on ne l'a pas, on ne la fera pas."
    Victor Hugo avait en partie raison. Nos prédécesseur de 1887 ont tenté cette œuvre ; mais, par timidité et sous l'empire de scrupules juridiques excessifs, ils l'ont manquée.
...
M. le ministre des cultes : ...  Il faut étendre les sanctions pénales proposées par M. Grosjean aux infractions concernant les immeubles ; il y aurait donc lieu d'ajouter l'article 4 de la loi de 1887 aux textes visés par M. Grosjean.
...
M. Grosjean : ... , dans le texte primitif de l'amendement que j'ai déposé, j'avais inséré ce paragraphe :
    " Nul travail de réparation, restauration ou entretien à faire aux monuments ou objets mobiliers classé ne peut être commencé sans l'autorisation du ministres des beaux-arts, ni exécuté hors la surveillance de son administration, sous peine, contre les propriétaires, occupants ou détenteurs qui auraient ordonné ces travaux, d'une amende de 16 à 1 500 fr."
    Je répondrai, je crois, parfaitement aux intentions de M. le ministre et aux préoccupations de la Chambre en demandant l'insertion de cette disposition dans le texte nouveau que j'ai remis au commencement de la séance à M. le président. (Très bien ! très bien ! au centre et sur divers bancs à gauche.)
...
M. le président : Voici comment serait rédigé l'amendement :
      "Dans le cas où la vente ou l'échange d'un objet classé serait autorisé par le ministre de l'instruction publique et des beaux-arts, un droit de préemption est accordé : 1° aux associations cultuelles ; 2° aux communes ; 3° aux départements ; 4° aux musées et sociétés d'art et d'archéologie ; 5° à l'État. Le prix sera fixé par trois experts que désigneront le vendeur, l'acquéreur et le président du tribunal civil
   "Si aucun des acquéreurs visés ci-dessus ne fait usage du droit de préemption la vente sera libre ; mais il est interdit à l'acheteur d'un objet classé de le transporter hors de France.
     " Nul travail de réparation, restauration ou entretien à faire aux monuments ou objets mobiliers classé ne peut être commencé sans l'autorisation du ministres des beaux-arts, ni exécuté hors la surveillance de son administration, sous peine, contre les propriétaires, occupants ou détenteurs qui auraient ordonné ces travaux, d'une amende de 16 à 1 500 fr."
  "Toute infraction aux dispositions ci-dessus ainsi qu'à celles de l'article 15  et des articles 4, 11, 12 et 13 de la loi du 30 mars 1887 sera punie d'une amende de 100 à 10 000 fr. et d'un emprisonnement de six jours à trois mois, ou de l'une de ces deux peines seulement."

M. le ministre des cultes : Je ne vois pas qu'il soit fait mention dans la rédaction nouvelle des immeubles par destination.

M. Jean Cruppi : ..., on pourrait mettre en tête de l'article un paragraphe ainsi conçu : " Les immeubles par destination, classés en vertu de la loi du 30 mars 1887, sont inaliénables et imprescriptibles.
...
M. Le président : Je mets aux voix le texte formé par ces divers dispositions qui forment l'amendement de MM. Grosjean, Berger et Aynard.
(Ce texte, mis aux voix, est adopté)
    M. Rouanet propose un paragraphe additionnel ... ainsi conçu :
    " La visite des édifices et l'exposition des objets mobiliers classés seront publiques : elles ne pourront donner lieu à aucune taxe ni redevance obligatoire."
    Pourquoi le mot "obligatoire" ?
(La suppression du mot est acceptée ; un premier vote, à main levée sur ce texte est déclaré douteux par le bureau. Un scrutin est ouvert et la paragraphe additionnel est adopté par 338 voix contre 250.)
    Je mets aux voix l'ensemble de l'article 15 bis, en ces termes :
    "Art. 15 bis. -  Les immeubles par destination classés en vertu de la loi du 30 mars 1887 ou de la présente loi sont inaliénables et imprescriptibles
   "Dans le cas où la vente ou l'échange d'un objet classé serait autorisé par le ministre de l'instruction publique et des beaux-arts, un droit de préemption est accordé : 1° aux associations cultuelles ; 2° aux communes ; 3° aux départements ; 4° aux musées et sociétés d'art et d'archéologie ; 5° à l'État. Le prix sera fixé par trois experts que désigneront le vendeur, l'acquéreur et le président du tribunal civil
  " Si aucun des acquéreurs visés ci-dessus ne fait usage du droit de préemption la vente sera libre ; mais il est interdit à l'acheteur d'un objet classé de le transporter hors de France.
  "Nul travail de réparation, restauration ou entretien à faire aux monuments ou objets mobiliers classé ne peut être commencé sans l'autorisation du ministres des beaux-arts, ni exécuté hors la surveillance de son administration, sous peine, contre les propriétaires, occupants ou détenteurs qui auraient ordonné ces travaux, d'une amende de 16 à 1 500 fr.).
  "Toute infraction aux dispositions ci-dessus ainsi qu'à celles de l'article 16 de la présente loi et des articles 4, 10, 11, 12 et 13 de la loi du 30 mars 1887 sera punie d'une amende de 100 à 10 000 fr.) et d'un emprisonnement de six jours à trois mois, ou de l'une de ces deux peines seulement.
   "La visite des édifices et l'exposition des objets mobiliers classés seront publiques : elles ne pourront donner lieu à aucune taxe ni redevance."
    (L'ensemble de l'article 15 bis, mis aux voix, est adopté.)

    Nous passons à l'article suivant, pour lequel la commission propose une nouvelle rédaction qui a été distribuée :
    Titre IV
    Des associations pour l'exercice des cultes
"Art. 16.- Les associations formées pour subvenir aux frais, à l'entretien et à l'exercice public d'un culte devront être constituées conformément aux articles 5 et suivants du titre Ier de la loi du 1er juillet 1901. Elles seront, en outre, soumises aux prescriptions de la présente loi."
    (MM. Réveillaud et ses amis, M. Ferdinand Buisson et M. Georges Grosjean qui avaient déposé des amendements les retirent)
...
M. Gayraud : Je n'ai aucune objection à faire contre la première phrase de l'article 16. J'admets très bien que des associations formées pour subvenir aux frais d'un culte doivent être constituées conformément aux articles 5 et suivant du titre 1er de la loi du 1er juillet 1901.
    C'est à propos de la second phrase : "Elles seront en outre soumises aux prescriptions de la présente loi", que je tiens à présenter quelques observations à la Chambre avant qu'elle ne passe au vote de cet article.
...
    Je ne voudrais pas que le vote de l'article 17 pût attirer sur votre loi ... une condamnation semblable à celle qui a frappé la constitution civile du clergé de 1791. Vous le comprenez bien, s'il en était ainsi, vous poursuivriez en vain, par rapport à nous catholiques, le vote de cette loi, car dès maintenant vous iriez contre vos déclarations les plus formelles, vous ne feriez pas une loi acceptable pour l'Église catholique.
    Il faut que vous sachiez, messieurs, que la constitution de l'Église catholique n'est pas une constitution démocratique.

M. Aubry :  Nous nous en doutions.

M. Bepmale : Nous le savions depuis longtemps.

M. Gayraud : Ce qui ne veut pas dire qu'elle n'aime pas la démocratie
...
M. Gayraud : ... La constitution de l'Église catholique est monarchique. Il s'ensuit que vous ne pouvez pas introduire, à son insu, dans son organisation un principe démocratique qui vous exposerait à un désaveu et à une condamnation... (Interruptions à gauche et à l'extrême gauche.)
...
... L'autorité ecclésiastique est souveraine non seulement dans l'enseignement, dans l'administration des sacrements, mais encore, de par le droit constitutif de l'Église, dans l'administration du temporel.... ce n'est pas à dire que, dans certains cas, l'Église n'ait accepté de partager l'administration du temporel avec des laïques ; mais il faut que vous sachiez que cela a été l'effet d'une concession de la puissance ecclésiastique.

M. Aubry : Quand elle ne pouvait pas faire autrement.

M. Balitrand :  Par extraordinaire.
...
M. Gayraud : La loi que nous faisons intéresse-t-elle l'Église, oui ou non, mes chers collègues ? Si elle intéresse l'Église, j'ai le droit de dire ce que l'Église en pense.
...
    En nous plaçant à ce point de vue, lorsque vous légiférez ou menacez de légiférer et d'imposer à l'Église une certaine organisation des paroisses, en vertu de laquelle vous ferez passer au nom de la puissance civile, l'administration du temporel des paroisses, entre les mains des laïques, vous commettrez un empiétement sur la puissance spirituelle, vous vous ingérez dans un domaine qui n'est pas le vôtre. (Exclamations à l'extrême gauche) et vous exposez purement et simplement à ce que l'autorité spirituelle interdise aux associations cultuelles de se constituer de cette manière. (Nouvelles exclamations à gauche.- Très bien ! très bien ! sur divers bancs à droite.)
...
    Si c'est cela que vous voulez dites-le ; je ne demande pas mieux. Mais alors je me tournerai du côté du Gouvernement et je lui dirai : Qu'il soit bien entendu que la loi que vous faites n'est pas acceptable pour l'Église catholique.
...
M. le rapporteur :  Il faut dire en quoi elle n'est pas acceptable.

M. Balitrand : Toutes les lois doivent être acceptées par tous les citoyens français.

M. Gayraud : Vous savez, monsieur Balitrand, qu'il y a des lois que l'Église catholique n'accepte et n'acceptera jamais ... (Exclamations à l'extrême gauche.)

M. Balitrand : Il serait bon que le pays connusse ces paroles !

M. Gayraud : ... parce qu'au dessus de la loi nous mettons la justice et la conscience religieuses. (Applaudissements à droite.- Vives interruptions à l'extrême gauche et sur divers bancs de la gauche.)
...
    ... si je prends le texte de la commission, j'y vois d'abord que les associations cultuelles devront être composées d'un certain nombre de personnes. Le premier texte portait que ces associations seront composées de sept personnes. Je n'avais point songé à m'élever contre ce texte, parce que l'Église a accepté depuis longtemps de constituer des conseils de fabrique avec un nombre déterminé de personnes. Mais aujourd'hui vous aggravez singulièrement la loi. D'abord, vous maintenez le chiffre de sept membres pour les communes de moins de 1000 habitants ; puis vous adoptez le chiffre de quinze pour les communes de 1000 à 20 000 habitants et celui de 25 pour celles dont la population dépasse 25 000 habitants. Je vous avertis que cette réglementation du nombre des membres de nos associations pourrait bien se heurter au refus de l'autorité religieuse, parce que vous empiétez sur son domaine.

M. le rapporteur : C'est qu'alors l'Église catholique n'acceptera de faire à la France des concessions qu'elle a faites à d'autres pays sur les mêmes points.
    Je constate que sa doctrine inflexible en France ne s'est pas partout montré aussi intransigeante.
...
M. Jules Coutant (Seine) : Nous demandons l'affichage du discours de M. Gayraud. (Interruptions et bruit à droite)

M. Gayraud : ... Vous, société civile, État laïque, vous voulez imposer à l'autorité religieuse, au moment même où vous vous séparez d'elle, des conditions d'organisation intérieure qu'elle est en droit de ne pas recevoir de vous. ... Je n'avais aucune objection à faire sur le texte primitif de la commission ; je vous ai dit pourquoi : parce qu'en France l'Église catholique, le Saint Siège a accepté depuis longtemps une organisation dans laquelle les laïques, au nombre de sept ou huit, jouent un rôle dans l'administration paroissiale.

M. le rapporteur : Dorénavant, les femmes elles-mêmes y seront admises ; on peut donc multiplier par deux le nombre des membres des associations cultuelles.

M. Gayraud : Pas de plaisanterie !

M. le rapporteur : Je ne plaisante pas. En vertu de l'article 17, non seulement les hommes mais encore les femmes majeures, domiciliées et résidant dans la circonscription religieuse, peuvent faire partie de l'association. C'est une faculté dont vous devez tenir compte.

M. Gayraud : ... je vous répète que, eussiez-vous mille fois raison, ..., de nous demander de voter une pareille mesure, eussiez-vous conçu l'administration de la paroisse mieux que l'Église catholique ne l'a jamais organisé nulle part, de quel droit vous, société civile, vous État laïque, voulez-vous imposer votre manière de voir à l'autorité religieuse dans un domaine qui n'est pas le vôtre.
    C'est là toute la difficulté ; votre texte ne pourra être acceptable par nous qu'autant qu'il aura été accepté par le Saint-Siège ; voilà mon argumentation. (Exclamations ironiques à gauche.)

M. le président : La liberté de discussion veut qu'on entende tout.

M. Jules Coutant (Seine) : On ne peut laisser faire  des lois françaises par des étrangers.

M. Gayraud :  Encore une fois je ne dis pas que le Saint-Siège n'acceptera pas cette organisation, je n'en sais rien, mais ...  vous outrepassez vous droits ...
    Je passe à un autre point. Vous dites dans votre texte : "les associations ne pourront inscrire dans leurs statuts aucune clause tendant à exclure l'assemblée générale de leurs membres de la participation à l'administration légale des bien".

M. le rapporteur : C'est naturel.

M. Gayraud : Je ne dis pas que cela ne soit pas naturel, je dis simplement que vous intervenez dans un domaine qui n'est pas le vôtre. Voilà tout ce que je veux dire. Je comprends très bien, monsieur Buisson, que vous ne puissiez pas admettre ma thèse. Il est évident que l'esprit catholique est un peu différent en cela de l'esprit des Églises réformées. Voilà pourquoi j'insistait tout à l'heure en vous disant que l'Église catholique est une société à constitution monarchique et non une société à constitution démocratique. ...
    C'est tout ce que je voulais dire à la Chambre. Si la commission, le Gouvernement et la Chambre jugent bon de passer outre, soit, qu'ils le fassent.

A l'extrême gauche. C'est bien ce que nous ferons.
...
    Si vous voulez aller au schisme, faire constitution civile du clergé, ouvrir une ère de difficulté et d'agitation religieuse, faites-le. Quant à moi je ne m'y associerai point et je proteste dès maintenant contre votre tyrannie. (Applaudissement à droite.)

M. le président : Il n'y plu d'observation sur l'article 16 ?
...
    Je donne une nouvelle lecture de l'article 16 avant de le mettre aux voix :
...
(L'article 16, mis aux voix, est adopté.)
    Nous passons à l'article 17.
    "Art. 17.- Ces associations devront avoir exclusivement pour objet l'exercice d'un culte et être composés au moins :
   "Sept membres Dans les communes de moins de 1.000 habitants  ;
   "Quinze membres dans les communes de 1.000 à 20.000 habitants;
   "Vingt-cinq membres dans les communes dont le nombre des habitants est supérieur à 20.000 ;
   "Les personnes composant les associations devront être majeures, domiciliées ou résidant dans la circonscription religieuse.
   "Les associations ne pourront inscrire dans leurs statuts aucune clause tendant à exclure l'assemblée générale de leurs membres de la participation à l'administration légale des biens.
  "Elles pourront recevoir, en outre, des cotisations prévues par l'article 6 de la loi du 1er juillet 1901, le produit des quêtes et collectes pour les frais du culte, percevoir des rétributions : pour les cérémonies et services religieux même par fondation ; pour la location des bancs et sièges ; pour la fourniture des objets destinés au service des funérailles dans les édifices religieux et à la décoration de ces édifices.
 "Elles pourront verser, sans donner lieu à perception de droits, le surplus de leurs recettes à d'autres associations constituées pour le même objet.
  " Elles ne pourront, sous quelque forme que ce soit, recevoir des subventions de l'État, des départements et des communes."
    Les cinq premiers alinéas peuvent être considéré comme constituant le premier paragraphe de l'article.
...
    M. Ribot reprend l'ancien texte de la commission.
    Tout d'abord je dois appeler un certain nombre d'amendements sur le premier paragraphe de l'article 17
    Le premier est de M. Buisson ... qui tend à introduire un paragraphe 1er qui serait ainsi conçu :
    "Ces associations devront être ouvertes à tous ceux qui rempliront les conditions d'admission prévues par les statuts.
    "En cas de contestation relative, soit à l'inscription ou à la radiation de membres de l'association, soit à l'exécution des statuts, il sera pourvu au règlement du litige par le tribunal civil du ressort."
(Il s'en suit un long débat sur ce que les laïques entendent par catholiques, par Église catholique et par catholicisme)
...
M. Lemire : Sommes-nous dans un concile ? (bruit à gauche. - Très bien ! très bien ! à droite.) Comment peut-on parler de ces choses devant cette Chambre ?

M. le président : Écoutez l'orateur, monsieur Lemire. Tout à l'heure je trouvais malséant qu'on interrompit M. Gayraud ; je trouve tout aussi mauvais qu'on interrompe M. Buisson qui a le droit d'exposer ses idées : ce ne sont certainement pas les vôtres.

M. Lemire : je voudrais avoir les pouvoirs de Rome pour répondre.  (Très bien ! très bien ! à droite.)
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M. Ferdinand Buisson : Le plus illustre orateur catholique de cette chambre l'a dit il y a longtemps : "La lutte est entre la Révolution et la contre-révolution menée par le Syllabus". C'est toujours vrai. ... à moins qu'un jour ne vienne où l'un des deux adversaires aura été gagné, éclairé, persuadé, convaincu par l'autre et où le combat cessera faute de combattants. (Exclamations ironiques à droite.) Mais en attendant, je dis que nous ne perdons pas notre temps, que nous n'avons pas pas fait une besogne vaine et verbale en nous disputant le terrain pied à pied. En ce moment, le tout petit coin de ce vaste terrain sur lequel je demande à nos amis républicains de se concentrer dans une opération énergique, est le suivant : ne pas permettre que l'association cultuelle, quelle qu'elle soit et avec quelques statuts qu'elle opère, devienne, au lieu d'une association catholique, un comité clérical, au lieu d'une société ouverte, une coterie fermée. (Exclamations à droite.)
    Je demande que ces associations auxquelles nous faisons l'attribution de biens si considérables se constituent conformément à leur objet pour servir les intérêts du culte et non pour autre chose.
    Messieurs, donner ce caractère aux associations cultuelles catholiques, bien loin d'être un acte de malveillance à l'égard du clergé, c'est le meilleur moyen d'encourager ...  les prêtres amis de la paix et uniquement préoccupés de la religion. J'aime à croire qu'ils sont encore très nombreux. L'influence qu'ils doivent chercher et que vous devez chercher pour eux ... c'est une influence religieuse et non politique. A se mettre au service d'un parti politique, ils ne peuvent faire qu'une œuvre étroite et mesquine, qui n'est pas en conformité avec leur ministère.
    Inscrivons dans la loi une disposition qui leur permettra de répondre à des politiciens trop exigeants, trop indiscrets, s'il s'en rencontre, qui veuillent s'emparer de la petite association cultuelle pour en faire leur chose et leur instrument : "je ne puis m'y prêter, la loi ne me permet pas de choisir les uns et d'exclure les autres, mon association est ouverte à des catholiques de toute nuance et de toute opinion ; je me dois à mes paroissiens, je suis pasteur de tous et non agent électoral de quelques uns."
...
(L'amendement de M. Buisson sera repoussé par 526 voix contre 42, ainsi que celui de M. Ribot par 309 voix contre 257. La suite de la discussion sera reportée à une date ultérieure.)
 
 
 

©Maurice Gelbard
9, chemin du clos d'Artois
91490 Oncy sur École
ISBN 2 - 9505795 -2 - 3