M. Charles Bernard : ... Après avoir entendu les
discours prononcé ici par M. l'abbé Lemire et par M. l'abbé
Gayraud, nous restons partisans de la séparation des Églises
et de l'État ; mais nous voulons pour ce pays la liberté
absolue d'association ainsi que le demandait M. Goblet, qui n'était
pas suspect de cléricalisme. Nous voulons la liberté pour
tous ; le Gouvernement qui est sur ces bancs se réclame de cette
formule et peut nous apporter un projet sur la liberté d'association.
Nous serons partisans de la séparation des Églises et de
l'État lorsque la liberté sera égale pour tous les
citoyens français et non le privilège de quelque- uns comme
vous le voulez. (Applaudissements sur quelques bancs à l'extrême
gauche.)
Voilà pourquoi nous avons l'honneur avec
quelques camarades de cette Chambre d'inviter le Gouvernement de défense
républicaine à reprendre l'ancien programme républicain
et à le faire aboutir ...
Voix à droite : L'avis du Gouvernement
!
... ou sinon, nous serions obligé de retourner
devant le pays et lui dire que vous avez menti à vos promesses et
qu'au lieu d'être un ministère de défense républicaine,
vous n'êtes qu'un ministère de Tartufes. (Vives protestations
sur de nombreux bancs. - Applaudissements sur plusieurs bancs à
l'extrême gauche. - Bruits)
A gauche : A l'ordre !
M. le président :Je rappelle M. Charles Bernard à
l'ordre avec inscription au procès-verbal. (Interruptions à
l'extrême gauche et à gauche.)
La parole est à M. le président
du conseil.
M. Waldeck-Rousseau, président du conseil, ministre
de l'intérieur et des cultes : Messieurs, en répondant
à M. Charles Bernard, je défère au désir qui
a été exprimé par un de nos collègues qui demandait
l'avis du Gouvernement sur la motion dont la Chambre a été
saisie.
Cet avis est aisé à formuler, et M.
Charles Bernard, il me semble, l'a laissé prévoir. Il a invoqué
ici l'autorité d'un homme politique, l'honorable M. Goblet. C'est
avec les paroles de M. Goblet et avec sa politique que je vais
lui répondre.
M. Goblet était partisan de la séparation
de l'Église et de l'État. Il a dit à plusieurs reprises,
notamment en 1887, qu'aussi bien dans l'intérêt des droits
de l'État que dans l'intérêt des droits de la conscience,
la séparation ne pourrait être accomplie qu'après que
le Parlement aurait voté une loi sur les associations. J'ai
d'autant mieux le droit de rappeler cette formule que le projet dont nous
avons saisi la chambre (3 semaines
plus tôt) - j'éprouve quelque regret à
le dire - je l'avais déjà déposé après
le ministère Gambetta en 1882. je l'ai déposé de nouveau
au moment du ministère Ferry. (On rit.)
Je considère en effet que le vote
de cette loi sur les associations est une préface nécessaire
; j'en indique un motif de plus : c'est que depuis ce dépôt,
certains faits se sont produits, certains événements
se sont accomplis, et ma conviction entière est à l'heure
actuelle que la séparation de l'Église et de l'État,
sans nulle préparation, ne se ferait ni au profit de l'État,
ni au profit de l'Église, mais au profit des congrégations.
(Applaudissements
à gauche.)
...
(La motion ne recueille que 128 voix contre 328)
M. Firmin Faure : 128 anticléricaux seulement ! Encore
une faillite des radicaux ! (Bruits.)
...