"Archives Israélites"
Jeudi 10 novembre 1904
LE CULTE ISRAÉLITE
ET LE PROJET DU GOUVERNEMENT SUR LA SÉPARATION
Nous avons essayé de montrer, la semaine dernière,
que le projet Combes n'est pas conçu dans un esprit libéral,
qu'il s'applique à enserrer les cultes dans les mailles d'une réglementation
tracassière, de nature à gêner, sinon paralyser leur
fonctionnement, par une conséquence logique, à rendre l'exercice
de la religion malaisé, ce qui est contraire au principe qui doit
demeurer intangible, dans un État démocratique, de
la liberté de conscience. Quand des ministres les cultes sont, comme
sous le régime actuel, des fonctionnaires de l'État, on comprend
qu'ils soient soumis pour le recrutement à des conditions spéciales;
quand l'État verse annuellement aux cultes des subventions, on comprend
qu'il soit en droit - dont il n'use d'ailleurs que depuis dix ans seulement
- de connaître l'emploi des fonds qu'il met à leur disposition
et qu'il soumette leurs comptes en bloc à son contrôle.
Mais du jour où il rompt toute attache avec
les confessions religieuses, qu'il ne connaît plus, qu'il leur ferme
sa caisse et les abandonne à leur sort, on ne s'explique pas qu'il
persiste à les tenir sous sa férule, à s'immiscer
dans leurs affaires intérieures, dans leur administration, dans
la gestion de leurs finances, comme l'établit le projet présenté
à la Chambre par le gouvernement.
Ce projet présente encore une autre anomalie,
un autre inconvénient, en dehors de cet empiétement sur le
domaine confessionnel auquel il déclare vouloir demeurer étranger,
c'est qu'il applique un traitement identique aux trois cultes, celui de
la majorité et ceux de la minorité dont le régime
intérieur, les conditions d'organisation et de fonctionnement diffèrent
sensiblement.
Nous avons déjà dit que la Séparation,
c'était uniquement l'Église catholique qui l'avait provoquée,
déchaînée par ses entreprises continuelles sur le terrain
politique, par ses menées et ses relations suspectes avec les partis
hostiles à la République.
L'État juge nécessaire de rompre avec
une confession qui pratique si peu le loyalisme qu'il est en droit d'attendre
d'elle, et dénonçant le Concordat qui le lie à l'Église,
il dénonce du même coup les conventions que, sous forme de
lois et de décrets, il a conclues avec les cultes protestant et
israélite dont l'attitude constitutionnelle n'a donné
lieu à aucun reproche, prise à aucun soupçon.
Le seul trait commun que les trois cultes avaient
au regard de l'État, c'est qu'ils étaient reconnus et subventionnés,
et la disgrâce de l'Église devait entraîner fatalement
celle tout à fait imméritée du Temple protestant et
de la Synagogue. mais c'est pousser un peu loin la conception du principe
de l'égalité et l'amour de la symétrie que de soumettre
leur condition future à une législation absolument identique.
Égalité n'est pas synonyme d'identité.
Que l'État cesse de subventionner les divers
cultes, rien n'est plus juste sous le régime de la Séparation.
Mais une distinction, si l'on veut être équitable, doit s'établir
dans l'organisation nouvelle, qu'en dépit de la liberté attendue,
on leur imposera.
D'ailleurs, ces distinctions, n'existent-elles pas
déjà dans le régime présent ? Chaque culte
n'a-t-il pas une organisation intérieure qui le différencie
des autres, et la législation de l'État ne varie-t-elle pas,
pour cette raison, de l'un à l'autre ?
Pourquoi alors le projet de M. le Président
du Conseil ne tient-il pas compte de cette diversité de constitution
organique et de fonctionnement ?
Soucieux d'empêcher l'Église catholique,
qui peut grouper en France sous son obédience 35 millions de catholique,
il n'autorise les associations de culte à se fédérer
que dans les limites d'un seul département. Mais est-il juste d'étendre
cette mesure de précaution aux cultes protestant et israélite
dont le nombre de fidèles est hors de proportion, par son infimité
et leur dispersion aux quatre coins du territoire, avec celui des catholiques
?
La limitation à un département prescrite
par l'article 8 des associations du culte, peut se justifier vis-à-vis
de l'Église catholique dont la puissance numérique se chiffre
par des millions, contre laquelle l'État laïque tient à
se défendre et à se garder. Mais les 90 000 juifs de France,
mais les quelques centaines de mille de protestants unissant leurs efforts,
leurs ressources pour assurer la vie des centres religieux ne se suffisant
pas à eux-mêmes, quel danger peut-il vraiment en résulter
pour la sécurité de l'État ?
Cette restriction d'ailleurs ne gênera en
rien l'action religieuse de l'Église, qui compte dans chaque département
un nombre considérable de fidèles en état de faire
vivre les organes du culte. Il n'en est pas de même pour les cultes
protestants et israélite dont la population est très disséminée.
Il y a cinquante départements en France sur
86 qui ne possèdent pas de Communautés israélites
et où l'élément juif n'est représenté
- quand il l'est - que par quelques isolés. Leur interdira-t-on
de contribuer aux frais du culte des Communautés des départements
voisins ?
Dans d'autres, on ne rencontre que des Communautés
très pauvres, qui doivent forcément tirer d'ailleurs les
ressources pour faire vivre leur culte.
Si l'on pratique le système des cloisons
étanches qu'établit l'article 8, la vie religieuse du Judaïsme
se trouvera enrayée tandis que celle du catholicisme demeurera indemne.
D'ailleurs, on lira plus loin la lettre que l'éminent
Grand Rabbin de France vient d'adresser à un de nos confrères
de la presse protestante sur cet article qui lèse les intérêts
spirituels des réformés aussi bien que des israélites,
et que le Gouvernement, s'il tient à demeurer équitable,
ne peut persister à maintenir.
La même hantise d'uniformité, nous
la retrouvons dans le taux des pensions de retraites attribuées
aux ministres des cultes. On n'y tient pas compte de la différence
qui existe, au point de vue des nécessités les plus immédiates
de la vie, entre le pasteur ou le rabbin chargé de famille et le
prêtre catholique célibataire.
Nous imaginons que les représentants du culte
israélites sauront, devant la Commission de la Chambre où
ils seront vraisemblablement appelés, faire ressortir les graves
dommages qui résulteraient pour le Judaïsme de plusieurs des
dispositions du projet du gouvernement.
Si nous ne lui avons pas ménagé les
critiques, nous devons - c'est une justice à lui rendre - louer
en particulier la rédaction des articles 16 et 17 qui s'appliquent
à assurer la défense et la protection de chaque culte contre
les attaques d'un autre, et vis-à-vis des manifestations de groupements
ou d'individus hostiles à toute organisation religieuse. Nous y
renvoyons nos lecteurs.
Mais sauf ces réserves, le projet traite
tous les cultes en suspects, leur applique un régime d'exception,
et s'il n'est pas, comme nous l'espérons pour l'honneur de nos institutions
républicaines, profondément remanié dans un esprit
plus bienveillant et plus tolérant, en particulier le culte israélite,
du fait de sa nouvelle législation, sera beaucoup moins bien traité
qu'il ne l'est, nous ne disons pas en Angleterre ou aux États-Unis,
mais, par exemple, en Prusse, voire en Russie.
Il y va de l'honneur de la France, qu'innovant en
matière de culte, accomplissant une réforme capitale dans
ses rapports avec les Églises, celle-ci ne tranche pas, par ses
rigueurs, avec les dispositions libérales qui caractérisent
sa législation et qu'elle s'accorde mieux avec les principes de
justice et d'équité dont ses institutions politiques portent
la forte et généreuse emprunte !
H. Prague
UNE LETTRE DE M. LE GRAND-RABBIN DE FRANCE
Voici le texte de la lettre que M. le Grand-Rabbin Zadoc-Kahn a adressé
au Signal, et dont nous parlions plus haut :
Monsieur le Directeur
Dans
l'article que vous consacrez, dans le Signal du 1er novembre, au
nouveau projet présenté par M. le Président du Conseil
des ministres à la Commission de la Séparation des Églises
et de l'État, vous faites voir avec force quel coup redoutable,
peut-être mortel, serait porté au protestantisme français
par l'article 8 de ce projet, qui interdit aux associations religieuses
de former des unions dépassant les limites d'un département.
"Dans
certains départements, dites-vous, il n'y a pas d'Église
protestante officielle, et dans quelques autres elles sont si peu nombreuses,
qu'elles ne pourraient pas subsister par leurs seules ressources, si leurs
coreligionnaires plus fortunées ne leur venait en aide." Et vous
ajoutez : " A plus forte raison pour les communautés israélites."
Je vous remercie vivement, Monsieur le Directeur, de cette observation
qui concerne le culte israélite. Elle est tout ce qu'il y a de plus
exact. Dès le premier moment, j'ai été frappé
et alarmé de la situation critique que créerait aux petites
communautés israélites de province la restriction de l'article
8. La plupart d'entre elles seraient condamnées à disparaître
à bref délai, car jamais elles ne pourraient se maintenir
par leurs seules ressources.
En France,
le culte israélite se trouve concentré principalement à
Paris et dans quelques chefs-lieux de départements, tels que Nancy,
Lyon, Marseille, Bordeaux, etc. . Mais combien de départements où
il n'existe qu'une ou deux communautés toutes petites, obligées,
dans l'état actuel des choses, de demander, pour assurer l'entretien
d'un culte public, le concours d'autres départements plus favorisés
ou celui du Consistoire Central des Israélites de France ! Si cette
faculté devait leur être retirée, elles n'auraient
plus qu'à mettre la clef sur leurs modestes synagogues ou oratoires.
Il n'a certainement pu entrer dans l'esprit de M. le Président du
Conseil, de rendre inévitable un tel résultat.
Comme
vous et avec vous, je me permets de faire appel à son esprit d'équité
et d'impartialité avec l'espoir qu'une loi de liberté n'aura
pas pour effet, en dernière analyse, et suivant votre expression
si juste, de prononcer un arrêt de mort contre un grand nombre de
centres religieux dignes d'un meilleur sort.
Veuillez
agréer, Monsieur le Directeur, etc.
Zadoc-Kahn
Grand-Rabbin de France
LE
PROJET COMBES
SUR LA SÉPARATION DES ÉGLISES ET DE
L'ÉTAT (suite)
Art. 4
Les ministres
du culte qui, par application de la présente loi, cesseront de remplir
des fonctions rétribuées par l'État, recevront les
pensions et allocations suivantes :
1°
Les curés et desservants, vicaires généraux et chanoines,
âgés de plus de soixante ans et comptant vingt-cinq années
de service au moins, 900 fr. ; les vicaires remplissant les mêmes
conditions, 300 fr.
2°
Les curés et desservants, vicaires généraux et chanoines,
âgés de plus de cinquante ans et comptant au moins vingt ans
de services, 750 fr. ; les vicaires remplissant les mêmes conditions,
300 fr.
3°
Les curés et desservants, vicaires généraux et chanoines,
âgés de plus de quarante ans et comptant au moins quinze ans
de services au moins, 600 fr. ; les vicaires remplissant les mêmes
conditions, 250 fr.
4°
Les curés et desservants, âgés de moins de quarante
ans, recevront pendant quatre ans une allocation de 400 fr.
Les ministres
des cultes protestants et israélites, les directeurs et professeurs
des séminaires de ces cultes auront les mêmes pensions et
allocations que celles attribuées aux curés et desservants,
suivant les distinctions précités et à des taux calculés
dans les mêmes proportions que ci-dessus par rapport aux traitements
actuels.
Les archevêques
et évêques, le grand rabbin du consistoire central auront
une pension de 1 200 fr.
Ces pensions
et allocations cesseront de plein droit en cas de condamnation à
une peine afflictive ou infamante ou pour un des délits visés
par les articles 17 et 19 de la présente loi.
Les conditions
de payement de ces pensions et allocations, ainsi que toutes les mesures
propres à assurer l'exécution du présent article,
seront déterminées par un règlement d'administration
publique.
Art. 5
Les édifices
et autres biens affectés aux cultes antérieurement reconnus,
qui appartiennent à l'État, aux départements ou aux
communes, seront concédés, à titre onéreux,
aux associations qui se formeront pour l'exercice d'un culte, dans les
anciennes circonscriptions ecclésiastiques où se trouvent
ces biens.
Ces concessions,
qui n'auront d'effet que deux ans à partir du 1er janvier qui suivra
la promulgation de la présente loi, seront faites dans les limites
des besoins de ces associations par décret en conseil d'État
ou par arrêté préfectoral, suivant que les biens appartiendront
soit à l'état, soit aux départements ou aux communes,
pour une période de dix années et à charge d'en rendre
compte à l'expiration de cette période et de supporter les
frais d'entretien et de grosses réparation.
Elles
pourront être renouvelées, sous les mêmes conditions,
pour des périodes de même longueur ou des périodes
moindres.
Le prix
de la concession ne pourra dépasser le dixième des recettes
annuelles de l'association constatées d'après les dispositions
de l'article 9 de la présente loi.
Des subventions
pour grosses réparations pourront être accordées aux
départements et aux communes dans la limite du crédit inscrit
annuellement au budget du ministère de l'intérieur.
Les biens
non reconnus utiles pour les besoins des associations d'un culte ou dont
la concession n'aura pas été redemandée pourront dans
les mêmes formes être concédés à un autre
culte ou affectés à un service public.
Les conseils
municipaux et les conseils généraux seront appelés
à donner leur avis pour la concession des biens communaux ou départementaux.
Titre II
ASSOCIATION POUR L'EXERCICE
D'UN CULTE
Art. 6
Les associations
formées pour subvenir aux frais et à l'entretien d'un culte
devront être constituées conformément aux articles
5 et suivants de la loi du 1er juillet 1901 ; elles seront soumises aux
autres prescriptions de cette loi sous réserve des dispositions
ci-après :
Elles
devront avoir exclusivement pour objet l'exercice d'un culte.
Elles
ne pourront employer aucun étranger dans les fonctions de ministre
du culte.
Les administrateurs
ou directeurs devront être Français, jouir de leurs droits
civils, et avoir leur domicile dans le canton où se trouvent les
immeubles consacrés à l'exercice du culte.
Art. 7
Outre les
cotisations prévues par l'article 6 de la loi du 1er juillet 1901,
elles pourront recevoir le produit des quêtes et collectes faites
pour les frais d'entretien d'un culte, dans les édifices consacrés
à l'exercice public de ce culte, percevoir des taxes ou rétribution,
même par fondations, pour les cérémonies et service
religieux, pour la location des bancs et siège, pour la fourniture
des objets destinés au service des funérailles dans les édifices
religieux et à la décoration de ces édifices.
Art. 8
Ces associations
pourront, dans les formes déterminées par l'article 7 du
décret du 7 août 1901, constituer des unions.
Ces unions
ne pourront dépasser les limites du département.
Art. 9
Les associations
tiennent un état de leur de leurs recettes et de leurs dépenses
; elles dressent chaque année le compte financier de l'année
écoulée et l'État inventorié de leurs biens,
meubles et immeubles.
Elles
peuvent constituer un fonds de réserve dont le montant ne devra
pas être supérieur au tiers de l'ensemble de leurs recettes
annuelles.
Ce fonds
de réserve sera placé soit à la caisse des dépôts
et consignations, soit en titres nominatifs de rentes françaises
ou de valeurs garanties par l'État.
A défaut
par une association de remplir les charges de réparation qui lui
sont imposées par l'article 5 pour les immeubles concédés,
le fond de réserve pourra être employé par arrêté
préfectoral pris après mise en demeure restée sans
effet, à réparer lesdits immeubles.
Outre
ce fonds de réserve, elles pourront verser à la caisse des
dépôts et consignations d'autres sommes, mais seulement en
vue de l'achat ou de la construction d'immeubles nécessaires à
l'exercice du culte.
Elles
seront tenues de représenter sans déplacement, sur toute
réquisition du préfet lui-même ou à son délégué,
les comptes et états ci-dessus prévus.
Art. 10
Sont passibles
d'une amende de 16 à 1 000 fr. et d'un emprisonnement de six jours
à un an, ou de l'une de ces deux peines seulement, les directeurs
et administrateurs d'une association ou d'une union qui auront contrevenu
aux dispositions des articles 6, 7, 8 et 9.
Titre III
POLICE DES CULTES ET GARANTIE
DE LEUR LIBRE EXERCICE
Art. 11
Les cérémonies
d'un culte, les processions et autres manifestations religieuses ne peuvent
avoir lieu sur la voie publique, ni dans aucun lieu public, à l'exception
des cérémonies funèbres, ni dans aucun édifice
public autre que ceux concédés à un culte dans les
conditions déterminées par la présente loi.
Il est
interdit, à l'avenir, d'élever ou d'apposer aucun signe signe
ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement
public que ce soit, à l'exception des édifices concédés
pour l'exercice d'un culte, des terrains de sépulture privée
dans les cimetières, ainsi que des musées ou expositions
publics.
Art. 12
Les réunions
pour la célébration d'un culte ne peuvent avoir lieu qu'après
déclaration faite dans les conditions et les formes prescrites pour
les réunions publiques, par l'article 2 de la loi du 30 juin 1881.
Outre les noms, qualités et domiciles des déclarants, la
déclaration indiquera ceux des ministres du culte appelés
à l'exercice de leur ministère.
Une seule
déclaration suffit pour un ensemble de cérémonies
ou assemblées cultuelles permanentes ou périodiques. Elle
cesse de produire effet à l'expiration d'une année.
Toute
réunion non comprise dans la déclaration, tout modification
dans le choix du local ou des ministres du culte doivent être précédées
d'une déclaration nouvelle.
Les représentants
ou délégués de l'autorité publique ont toujours
accès dans les lieux de réunion pour l'exercice d'un culte.
Art. 13
Il est interdit
de se servir de l'édifice consacré à un culte pour
y tenir des réunions politiques.
Art. 14
Les contraventions
aux trois articles précédents sont punis d'une amende de
50 à 1 000 fr. et les infractions à l'article 13 peuvent
être, en outre, punies d'un emprisonnement de quinze jours à
trois mois.
Sont
passibles de ces peines, dans le cas des articles 12 et 13, ceux qui ont
organisé la réunion, ceux qui ont participé en qualité
de ministre du culte et ceux qui ont fourni le local.
Art. 15
Sont punis
d'une amende de 100 à 1 000 fr., et d'un emprisonnement de 6 jours
à trois mois, ou de l'une de ces deux peines seulement, ceux qui,
soit par menace ou abus d'autorité, soit en faisant craindre à
autrui de perdre son emploi ou d'exposer à un dommage sa personne,
sa famille ou sa fortune, auront tenté de contraindre ou d'empêcher
une ou plusieurs personnes d'exercer un culte, de contribuer aux frais
de ce culte, de célébrer certaines fêtes, d'observer
tel ou tel jour de repos et, en conséquence, d'ouvrir ou de fermer
leurs ateliers, boutiques ou magasins, et de faire ou quitter certains
travaux.
Art. 16
Sont punis
des mêmes peines ceux qui auront empêché, retardé
ou interrompu les exercices d'un culte par des troubles ou désordres
dans un édifice consacré à un culte conformément
à la loi.
Art. 17
Sera puni
des mêmes peines tout ministre d'un culte qui, dans l'exercice de
ce culte, se rendra coupable d'actes pouvant compromettre l'honneur des
citoyens et dégénérer contre eux en oppression, en
injure ou en scandale public, notamment par des inculpations dirigées
contre les personnes.
Art. 18
Tout ministre
d'un culte qui, dans les lieux où s'exerce ce culte, aura par des
discours prononcés, des lectures faites, des écrits distribués
ou des affiches apposés en public, soit outragé ou diffamé
un membre du Gouvernement ou des Chambres, ou une autorité publique,
soit cherché à influencer le vote des électeurs ou
à les déterminer à s'abstenir de voter, sera puni
d'une amende de 500 fr. à 3 000 fr. et d'un emprisonnement d'un
mois à un an, ou de l'une de ces deux peines seulement.
Art. 19
Si un discours
prononcé ou écrit affiché, lu ou distribué
publiquement dans les lieux où s'exerce le culte, contient une provocation
directe à résister à l'exécution des lois ou
aux actes légaux de l'autorité publique, ou s'il tend à
soulever ou à armer une partie des citoyens contre les autres, le
ministre du culte qui s'en sera rendu coupable sera puni d'un emprisonnement
de trois mois à deux ans, sans préjudice des peines de la
complicité dans le cas où la provocation aurait été
suivie d'une sédition, révolte ou guerre civile.
Art. 20
Dans le cas
des poursuites exercées par l'application des articles 12, 13, 17,
18 et 19, l'association propriétaire, concessionnaire ou locataire
de l'immeuble dans lequel le délit a été commis, et
ses directeurs et administrateurs sont civilement et solidairement responsables.
Si l'immeuble
a été concédé en vertu de la présente
loi, la concession en peut être retirée dans les formes où
elle a été faite.
La fermeture
du local peut être immédiatement ordonnée par l'autorité
judiciaire, qui prononce une condamnation pour infraction aux articles
13, 17, 18 et 19.
Titre IV
DISPOSITIONS GÉNÉRALES
ET TRANSITOIRES
Art. 21
Un règlement
d'administration publique déterminera les mesures propres à
assurer l'application de la présente loi. Il réglementera
en outre les sonneries des cloches.
Art. 22
L'article
463 du code pénal est applicable à tous les cas dans lesquels
la présente loi édicte les pénalités.
Art. 23
Les congrégations
religieuses demeurent soumises aux loi du 1er juillet 1901, du 4 septembre
1902 et du 7 juillet 1904.
Art. 24
La direction
des cultes continuera à fonctionner pour assurer l'exécution
de la présente loi.
Art. 25
Sont abrogées
toutes dispositions législatives ou réglementaires contraires
à la présente loi et notamment :
1°
La loi du 18 germinal an X qui a déclaré que
la convention du 26 messidor an IX entre le Gouvernement français
et le pape, ensemble les articles organiques de ladite convention,
seraient promulgués et exécutés comme des lois de
la République ;
2° Le décret
du 26 mars 1852 et la loi du 1er août 1879 sur les cultes protestants
;
3° Les décrets
du 17 mars 1808, la loi du 8 février 1831 sur le culte israélite
;
4° Les décrets
des 22 septembre 1812 et 19 mars 1859 ;
5° Les articles
201 à 208, 260 à 264, 294 du code pénal
6° Les articles
100 et 101, les paragraphes 11 et 12 de l'article 136 de la loi du
5 avril 1834 .
Suite