La Séparation et les Églises
NOTRE ENQUÊTE
Avant de continuer la publication des réponses qui nous sont parvenues, nous croyons utile de donner ici le texte de la délibération votée par le consistoire de Besançon sur la proposition de MM. les pasteurs H. Draussin et Bas
Le
Consistoire
Attendu que la question de la Séparation
des Églises et de l'État semble devoir, à plus ou
moins brève échéance, être résolue par
le Parlement;
Que l'abrogation éventuelle de la loi de
germinal an X du décret-loi de mars 1852 et des autres lois ou décret
relatifs au statut de l'Église réformée de France,
met les corps administratifs de cette Église en devoir de se préoccuper
du régime légal qui remplacera celui sous lequel elle a vécu
depuis 1802;
Considérant que certaines dispositions des
projets dont le pouvoir législatif est saisi, est de nature à
inquiéter les protestants réformés, comme d'ailleurs
leurs frères d'autres dénominations, soit par la situation
matérielle de leurs Églises, soit pour leur esprit de solidarité
qui a fait d'elles, durant toute leur histoire, une famille où riches
et pauvres ne séparent point leur destinée;
Considérant en particulier, que le morcellement
administratif, soit départemental, soit régional, aggravé
par la suppression de toute autorité centrale et de toute représentation
générale, serait contraire à leurs traditions séculaires
et funeste à leur existence même;
Regrette que les délégués de
nos consistoires n'aient pas été admis en temps utile à
présenter au sein de la commission de séparation les observations
critiques ou revendications que suggère la défense légitime
de nos droits et de nos libertés;
Prie respectueusement M. le ministres des cultes
de se rappeler que, si le protestantisme français a contribué
pour une bonne part à l'affermissement de nos libertés nationales
et au progrès de l'esprit public, aucun gouvernement n'a eu à
reprocher à ses corps ecclésiastiques, ni immixtion dans
les luttes de partis, ni action électorale, et de reconnaître
qu'il ne mérite pas d'être traité en ennemi ou en suspect.
Et demande instamment, non un privilège quelconque,
mais pour toutes les associations cultuelles, d'une part la sauvegarde
des droits acquis, la pleine jouissance des édifices qui leur appartiennent,
d'autre part, toutes les garanties du droit commun en matière de
liberté d'association et de propriété, telles que
le maintien pour l'Église réformée de son organisation
presbytérienne synodale et la faculté de recueillir et d'administrer,
sans restriction, les ressources nécessaires à sa vie et
à son développement.
Nous commençons ci-dessous la
publication de la réponse que nous adressée M. Pierre Rigot,
avocat au Conseil d'État, membre du conseil presbytéral de
l'Église réformée du Saint-Esprit.
Tout projet sur la séparation des Églises
et de l'État comporte rationnellement deux sortes de dispositions,
les unes consistant en réparations équitables, pendant une
période de transition tout au moins ; -les autres consistant dans
l'application du droit commun, autant que faire se pourra, au régime
nouveau qui s'établira pour les Églises.
Des réparations sont dues pour la cessation
imprévue d'un régime centenaire, sur lequel s'est fondée
une possession d'état respectable, et de la part des ministres du
culte quant à leurs traitements et de la part des établissements
ecclésiastiques quant aux édifices appartenant à l'État
ou aux communes dont ils ont, sous l'empire de la loi du 18 germinal an
X, l'usufruit légal.
Le projet de la commission, ni celui du gouvernement
ne donnent à cet égard satisfaction aux intérêts
lésés. Les chiffres des pensions de retraite sont insuffisants.
La maigre allocation de 400 francs pendant 4 ans seulement à ceux
qui ont moins de 40 ans est dérisoire. (Art 4° du projet du
gouvernement).
C'est trop peu de prolonger pendant deux ans la
jouissance gratuite des édifices consacrés au culte. (Art.
2 du projet du gouvernement).
La loi de du 30 octobre 1886 sur la laïcisation
de l'enseignement primaire a fixé un délai de cinq ans, pour
opérer la transmission au personnel laïque du personnel congréganiste.
Il serait de même équitable de fixer
une période de transition, tout au moins de cinq ans, pour donner
aux associations cultuelles le temps d'organiser le régime nouveau,
en prolongeant pendant cette période le service des traitements
ecclésiastiques dans leur intégralité, ainsi que la
jouissance gratuite des édifices consacrés au culte. Cette
jouissance gratuite devrait d'ailleurs être suivie d'une location
à très faible prix après la période transitoire.
Si l'on passe à la seconde catégorie
des dispositions des deux projets relatives à l'organisation et
au fonctionnement du régime nouveau, on voit qu'elles contiennent
de graves dérogations, plus graves et plus injustifiables sans doute
dans le projet du gouvernement, à ce qui est le droit commun. C'est
ce qui va être établi successivement, quant au droit d'association,
quant au régime de la propriété, quant à la
police des cultes, et quant aux charges fiscales.
DROIT D'ASSOCIATION
Les dérogations au droit
commun des associations, qui vont être relevées, sont imputables
au projet du gouvernement.
D'après la loi du 1er juillet 1901, les associations
religieuses sont traitées de même que les autres associations.
Les congrégations religieuses seules sont
placées sous un régime spécial. Les travaux préparatoires
ne laissent aucun doute à cet égard. En effet, l'article
2 du projet, voté par la Chambre des députés portait
: "Les associations de personnes autres que les associations religieuses
pourront se former librement." Dans le texte voté par le Sénat,
qui est devenu le texte définitif, les mots " autres que les
associations religieuses" ont été supprimés ;
ce qui expliqué par ce passage du rapport Vallé au Sénat
: "Il n'y a pas de raison pour que les associations de personnes qui se
réunissent dans un but religieux ne soient pas traitées sur
le même pied que les associations, qui auraient, par exemple, un
but contraire."
Les associations religieuses ne sont donc pas traitées
autrement que les associations de libres-pensées par la loi du 1er
juillet 1901. Et, en l'état de la théologie actuelle, la
différence entre les unes et les autres pourraient n'être
pas toujours très saisissables.
Cela étant,, des associations pour l'établissement
et l'exercice d'un culte non reconnu par l'État peuvent actuellement
se former librement sous l'empire de la loi du 1er juillet 1901, sauf à
obtenir pour l'ouverture du lieu de leur culte les autorisations requises.
Il leur est loisible par suite d'avoir des ministres et des administrateurs
et des directeurs de nationalité étrangère, ainsi
que de créer des unions, avec administration centrale, conformément
à l'article 7 du décret du 16 août 1901.
Les articles 6 et 8 du projet du gouvernement leur
enlèvent ces droits ainsi qu'elles les refusent aux association
nouvelles qui se formeront pour le maintien des cultes actuellement reconnus
par l'État sous le régime de la loi de l'an X.
D'après l'article 6, les ministres du culte,
administrateurs et directeurs des associations doivent être Français.
En ce qui la prescription relative aux ministres
du culte, les observations si judicieuses de M. Raoul Allier en ont fait
apparaître l'inutilité. J'ajouterai que, en tous cas,, la
loi à intervenir sur la séparation ne devrait pas
être plus exigeante que celle du 30 octobre 1886 sur l'enseignement
primaire, dont l'article 4 admet des instituteurs de nationalité
étrangère à enseigner dans les écoles libres,
à condition qu'ils soient autorisés à établir
leur domicile en France.
Quant aux directeurs et administrateurs, il est
intéressant de rappeler que le projet de loi de 1901 sur les associations
disposait : " Ne peuvent se former sans autorisation préalable par
décret rendu en Conseil d'État : les associations entre Français
et Étrangers; - les associations entre Français, dont le
siège ou la direction seraient à l'étranger, ou confiés
à des étrangers." Au cours de la discussion de ce projet,
M. Vaillant déposa un amendement tendant à ce que cette disposition
ne fût applicable qu'aux associations religieuses. (Séance
du 7 mars .....). M. Berry proposa de son côté d'y viser expressément
les associations dont les agissements seraient de nature à préparer
la grève générale.... La rédaction dernière
fut le résultat d'une transaction entre les partis. Elle porte :
Art. 12
- Les associations composées en majeure partie d'étrangers
, celles ayant des administrateurs étrangers ou leur siège
à l'étranger, et dont les agissements seraient de nature
soit à fausser les conditions normales du marché des valeurs
ou des marchandises, soit à menacer la sûreté intérieure
de l'État, dans les conditions prévues par les articles 75
à 101 du code pénal, pourront être dissoute par décret
du Président de la République rendu en conseil des ministres.
Par là, sous l'empire de la loi de 1901 sur
les associations, rien ne s'oppose à ce que les associations religieuses
aient des administrateurs et directeurs de nationalité étrangère.
Au surplus, il faut dire que la prohibition de l'article
6 du projet du gouvernement, en ce qui concerne l'emploi de pasteurs, administrateurs
ou directeurs de nationalité étrangère, n'intéresse
que fort peu pratiquement les églises du culte réformé
actuellement reconnu par l'État.
Il en est tout autrement de l'article 8 du même
projet, aux termes duquel les unions d'associations ne pourront dépasser
la limite d'un département.
Sur ce point fondamental pour des religions qui
sont nationales et qui entendent avoir un organisation nationale, les protestants
de toute confessions sont unanimes et irréductibles dans leur opposition
au projet du gouvernement. Rien ne pourra les faire départir de
cette attitude, ni l'espérance qu'on leur laissera discrètement
concevoir d'user de tolérance à cet égard, ni l'assurance
que cette disposition est dirigée contre le catholicisme.
Nous entendons n'être placé pas placé
sous un régime de tolérance. Et les coups portés au
catholicisme ne panseraient pas les graves blessures dont nous aurions
à souffrir. Au surplus, sur ce point, la disposition que nous combattons
est, en tant que dirigée contre le catholicisme, l'effet d'une véritable
aberration. Qu'importe au catholicisme qu'on lui interdise d'avoir en France
pour ses associations cultuelles des unions avec "une administration
ou direction centrale". (Texte de l'article 7 du décret du 16
août 1901), puisque le centre du culte catholique est non en France,
mais à Rome ? Cette interdiction sera sans effet sérieusement
préjudiciable à son égard tant qu'il y aura un Saint-Siège
et un denier de Saint-Pierre.
Elle met au contraire en question la vie même
des églises réformées, qui, surtout après la
séparation, devront s'appuyer sur leurs synodes. Le synode national
et les commissions délégués par lui pour exécuter
ses décisions seront les dispensateurs nécessaires de cette
vie à tant de communautés si inégalement pourvues
et réparties.
Les églises presbytériennes, dotées
ou non par l'État vivent librement sous ce régime dans tous
les pays, démocratiques ou monarchiques, qui nous entourent, Grande-Bretagne,
Pays-Bas, Belgique, cantons suisses. Et même ces Églises réformées
d'Alsace-Lorraine, dont nous avons été séparées
par le traité de Francfort, et que régit toujours la loi
du 15 germinal an X, maintenue par le gouvernement des provinces annexées,
ont établie à leur tête un synode avec la pleine approbation
de ce gouvernement.
On conviendra qu'il serait bien triste, et même
humiliant, que les mêmes églises, en France, et sous le gouvernement
de la République, fussent privées de cet organisme indispensable
à leur existence
Suite de l'article dans le n°
daté du 23 décembre 1904
RÉGIME DE LA PROPRIÉTÉ
Les établissements ecclésiastiques
ont un patrimoine qui se compose, soit des biens mobiliers ou immobiliers
provenant de dons et legs autorisés par le gouvernement, soit des
droits acquis par eux, d'après le droit commun sur les édifices
affectés au culte et tout ce qu'ils renferment.
Cette distinction est faite dans le projet de la
commission, qui, respectant le patrimoine provenant des dons et legs destinés
au culte, reconnaît aux établissements ecclésiastiques
le droit de les transférer aux associations qui leur succéderont
(Art. 7). Mais, quant à la seconde espèce de droit, le projet
de la commission (Art. 11) déroge gravement au droit commun, en
ne reconnaissant ces établissements propriétaires des édifices
construits sur des terrains leur appartenant, que lorsqu'ils les auront
acquis avec des fonds provenant exclusivement des libéralités
de fidèles.
Le projet du gouvernement ne faisant aucune distinction
attribue à l'État la propriété de l'entier
patrimoine des établissements ecclésiastiques, qu'il s'agisse
des biens productifs de revenus, provenant de dons et legs, ou des droits
acquis sur les édifices affectés au culte. L'État
ainsi investi de cette propriété fera des concession de dix
ans aux associations cultuelles, dans la limite des besoins de ces associations
appréciés par un décret en Conseil d'État.
Ce qui excéderait cette limite, serait attribué à
des établissements publics d'assistance. A l'expiration de la concession
décennale, l'État pourrait, suivant son bon plaisir, la renouveler
ou non (art. 3).
Il y a là une véritable confiscation,
qui ne se conçoit pas en dehors du bouleversement social provenant
d'une révolution, comme celle de la fin du XVIII° siècle.
Le respect de la propriété préside à la confection
de nos lois. L'État, qui est le tuteur actuel des établissements
ecclésiastiques, comme de tous les établissements publics,
à raison du patrimoine qu'ils ont acquis avec son autorisation,
ne doit pas les dépouiller. Si ces établissements ecclésiastiques,
après la séparation, cessent de constituer des établissements
publics, ils pourront se maintenir sous la forme d'associations. Comment
alors assimiler leurs biens aux biens vacants et sans maître nécessairement
dévolus à l'État ?
Quant à la propriété des édifices
consacrés au culte, si la construction en a été faite
avec des fonds donnés à raison de leur destination spéciale,
et provenant de diverses sources, il est naturel d'appliquer à cette
situation les règles suivantes de droit commun :
1° Ce qui a été donné sous
forme de subvention, donation, quêtes ou collectes, par l'État,
les départements, les communes, les établissements ecclésiastiques
et les particuliers, pour la construction, reconstruction ou embellissement
des édifices, dont s'agit, est considéré comme irrévocablement
donné et non sujet à répétition, tant que l'affectation
au culte sera maintenu ;
2° Le propriétaire du sol est propriétaire
de la construction ;
3° Dans le cas où l'affectation au culte
prendrait fin, les droits du propriétaire, du constructeur, et des
donateurs de sommes se régleraient conformément au droit
commun.
Le projet de la commission devrait être amendé
conformément à ces règles.
De même, en cas de location par l'État
ou les communes aux associations cultuelles, suffirait-il des laisser les
droits et obligations des propriétaires et locataires sous l'empire
du droit commun, ce qui exonérerait ces associations des frais de
grosses réparations et du paiement des primes d'assurance de l'immeuble,
mis à sa charge par l'art. 14 du projet de la commission et de l'art.
5 du projet du gouvernement.
Il y a lieu de rendre justice au projet de la commission,
en ce qu'il permet aux associations de posséder un fonds de réserve,
dont le revenu pourra égaler la moyenne des dépenses de l'association,
calculée sur une période de cinq années (art. 20).
Le projet du gouvernement, en limitant ce fonds au tiers des recettes annuelles
ne veut manifestement permettre à l'association que de vivoter
au jour le jour. (Art. 9).
POLICE DES CULTES
D'après le projet du Gouvernement,
la déclaration à faire pour la célébration
d'un culte conformément à l'art. 2 de la loi du 30 juin 1881
sur la liberté de réunion doit être renouvelée
chaque année. Il est permis à ce sujet de faire observer
que que l'exploitation d'un débit de boissons n'est astreinte qu'à
une seule déclaration déclaration une fois pour toute, par
l'art. 27 de la loi du 17 juillet 1880, et de même les entreprises
de spectacles publics par le décret du 6 janvier 1864.
D'après le même projet, les infractions
avec prescriptions concernant les déclarations à faire pour
l'ouverture d'un lieu de culte sont punies des peines correctionnelles
( 50 à 1.000 fr. d'amende, de 15 jours à trois mois de prison).
Les mêmes infractions, quand il s'agit de réunions autres
que la célébration d'un culte, ne sont punies que des peines
de simple police par l'article 10 de la loi du 30 juin 1881 sur la liberté
de réunion. Pourquoi cette différence.
Aux termes de l'article 17 du projet du gouvernement
"sera puni des mêmes peines tout ministre d'un culte qui, dans l'exercice
de ce culte, se rendra coupable d'actes pouvant compromettre l'honneur
des citoyens et dégénérer contre eux en oppression,
en injure ou en scandale public, notamment par des inculpations dirigées
contre les personnes."
Le délit devrait consister exclusivement
dans ce qui est énoncé à la fin de l'article :
"notamment par des inculpations dirigées contre les personnes.",
c'est à dire constituer soit une injure, soit une diffamation,
dont la définition légale est " toute allégation ou
imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à
la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé
" (art. 23 de la loi du 10 juillet 1881)
Le surplus de l'article 17 ci-dessus transcrit est
la formule d'un ancien cas d'abus, textuellement empruntée à
l'article 6 de la loi du 18 germinal an X, existant déjà
sous l'ancien régime et permettant de connaître des refus
de sacrements. Toutes les fois que les actes énoncés dans
l'art. 17 ne constituent ni une injure ni une diffamation d'après
le droit commun, ils auraient pu motiver une suppression ou un blâme
de la part de la part de l'ancien juge de l'abus, mais ils ne seront dans
la nature à justifier l'application d'une peine correctionnelle.
L'article 18 du projet du gouvernement qui rend
passible d'une amende de 500 fr. à 3.000 francs et d'un emprisonnement
de un mois à un an "tout ministre d'un culte qui, dans les lieux
ou s'exerce ce culte, aura par des discours prononcés ...., cherché
à influencer le vote des électeurs ..." donne ouverture
à un arbitraire très dangereux et à de véritables
procès de tendance. Exemple : Si un ministre du culte, en chaire,
combat l'alcoolisme et exhorte ses auditeurs à le combattre en toutes
circonstances et dans tous les actes de leur vie, ne pourrait-il pas être
accusé d'avoir cherché à influencer leur vote en faveur
d'un candidat antialcoolique.
Enfin, terminons sur ce point, en faisant observer
qu'il est inique de rendre, avec l'article 30 du projet du gouvernement,
l'association propriétaire ou concessionnaire de l'édifice
dans lequel le délit a été commis, ses directeurs
et administrateurs, civilement et solidairement responsables des conséquences
de ce délit, auquel ils sont restés parfaitement étrangers.
Que si, dans une association de libre-penseurs,
un conférencier attitré se rendait coupable d'un délit
d'injure ou de diffamation, il ne saurait être question de faire
peser aucune responsabilité à ce sujet sur l'association,
ses directeur et administrateurs, en dehors d'une participation personnelle
de leur part à ce délit.
Sur ce point encore, au détriment des associations
locales, le projet du gouvernement déroge au droit commun.
IMPÔTS
Il y a lieu d'appliquer aussi,
en ce qui concerne les impôts, aux associations cultuelles, le droit
commun applicable aux autre associations. Elles doivent par suite être
exonérées de l'impôt d'accroissement et de la taxe
sur le revenu des sociétés, établis exceptionnellement
par les articles 3 de la loi du 25 décembre 1880 et 7 de la loi
du 29 décembre 1884 sur les congrégations, communautés
et associations religieuses. Le projet de la commission (art. 20 bis) spécifie
qu'elles ne seront pas assujetties à la taxe d'accroissement. Il
garde le silence sur le second impôt, qui cependant ne peut porter
rationnellement que sur les revenus distribués aux associés.
D'après la la définition légale même de l'association
donnée par l'article 1er de la loi du 1er juillet 1901, cette association,
et par suite l'association cultuelle, est contractée "dans un but
autre que de partager des bénéfices."
Le projet du gouvernement est muet sur cette question.
Il laisse donc les associations cultuelles sous l'empire des dispositions
exceptionnelles des art 3 de la loi du 25 décembre 1880 et 7 de
la loi du 29 décembre 1884.
Sur ce point, comme sur les précédents,
il manifeste à leur égard les dispositions les plus malveillantes.
Si un semblable projet pouvait devenir la loi, le
régime de la séparation ne serait pas celui de la paix religieuse.
Pierre Rigot