PROPOSITION DE LOI
tendant à modifier les articles 3 et suivants
de la loi du 9 décembre 1905
sur la séparation des Églises et de l'État,
présentée para M. Lasies, député.
Messieurs, les incidents qui ont marqué l'exécution
des inventaires prouvent que la loi actuelle a vainement tenté de
concilier deux principes contradictoires. Les deux premiers articles établissent
la séparation de l'Église et de l'État poussée
jusqu'à la suppression du budget des cultes.
Tous les autres articles de la loi rétablissent
cette union de l'Église et de l'État supprimée par
les deux premiers : au lieu d'ignorer l'Église et de la soumettre
au droit commun, l'État la régente et lui impose un droit
exceptionnel.
Le régime de la séparation absolue
de l'Église et de l'État, quoique contraire à notre
tradition nationale, est cependant un régime sous lequel l'Église
peut vivre et prospérer, comme nous le voyons aux États-Unis,
au Mexique, en Belgique et en Italie, pourvu que, à l'exemple de
ces divers pays, elle soit complète, sincère et loyale.
La prétendue séparation établie
par la loi actuelle n'est qu'une servitude humiliante pour ceux qui la
subissent, source de difficultés pour le Gouvernement qui l'impose.
La liberté de l'Église n'aurait amené
aucune complication dans l'État, tandis que l'asservissement auquel
on la condamne risque de déchaîner de graves conflits religieux.
Ces conflits. toujours si douloureux à réprimer, nous demandons
qu'on les prévienne en se plaçant dans la logique et la loyauté
des principes.
Puisque l'on met l'Église hors de l'État,
il est inadmissible qu'on persiste à maintenir l'État dans
l'Église, qu'on crée des pénalités spéciales
contre les prêtres qui, dépouillés du salaire qui les
liait à l'État, ne sont plus que des citoyens soumis aux
règles du droit commun.
C'est le but que se propose notre proposition de
loi. Son adoption serait une œuvre de pacification religieuse, contre laquelle
nul bon citoyen n'aurait le droit de s'élever.
Il n'y a que deux manières de sortir de la
situation inquiétante où nous a plongés la rupture
du concordat: ou d'en raire un autre, ou d'appliquer dans toute sa sincérité
le régime nouveau de la séparation. Refaire un concordat
ne dépend pas de vous seuls mais il est en votre pouvoir de mettre
une réalité sous des paroles trompeuses et de réaliser
par la liberté l'indépendance de l'Église et de l'État.
C'est animé de cette pensée que nous
présentons la proposition de loi suivante: