M. Alexandre Zévaès.Fidèles
à la tradition du parti socialiste et nous le dire, à la
tradition de toute la démocratie républicaine, nous venons,
au nom du groupe socialiste , demander à la Chambre de se prononcer
pour la suppression du budget des cultes, c’est à dire pour untel
des réformes depuis longtemps inscrites dans le programme commun
à toutes les fractions du parti républicain. (Très
bien ! très bien ! à l’extrême gauche.)
Nous ne croyons pas utile de rappeler ici
tous les arguments d’ordre philosophique ou politique qui militent en faveur
d’une solution depuis si longtemps promise, mais toujours ajournée.
La discussion est épuisée ; les arguments ont été
surabondamment produits depuis vingt ans, et la question, comme on l’a
dit, est mûre aujourd’hui. (Très bien ! Très bien
! À l’extrême gauche.)
Mais il nous paraît que la question
revêt aujourd’hui un caractère plus urgent qu’autrefois, en
raison des agissements cléricaux qui se sont produits depuis ces
deux dernières années, que le Gouvernement lui-même
a reconnus et dénoncés et qui ont forcé tous les républicains
à ouvrir l’œil.
Le Gouvernement a si bien reconnu l’existence
d’un danger clérical qu’il a dû prendre l’initiative d’un
projet de loi sur les associations, et nous espérons que cette discussion
depuis si longtemps attendue, va commencer prochainement. . (Très
bien ! très bien ! à l’extrême gauche.)
Mais ce serait une œuvre singulièrement
incomplète celle qui consisterait à combattre exclusivement
les congrégations et qui maintiendrait dans ses privilèges,
entretenu par le budget de la République elle-même, le clergé
séculier. (Applaudissements sur les mêmes bancs.)
Nous ne devons pas, et le Gouvernement qui
se dit et veut être un gouvernement à la fois de défense
et d’action républicaine, ne doit pas fournir des armes aux
prédicateurs de l’armée noire, à ceux qui s e servent
des chaires de leur églises et de leurs chapelles pour critiquer
les institutions républicaines.
(Très bien ! Très
bien ! sur les mêmes bancs.)
Si vous voulez vraiment frapper le cléricalisme,
comme vous le dites et comme vous le commande l’œuvre de la défense
républicaine…..
……
…… à laquelle vous prétendez vous consacrer, il n’est
qu’un moyen sérieux, efficace : c’est de frapper le clergé
à la caisse. (Applaudissements à l’extrême gauche.
- Interruptions à droite.)
C’est avec le milliard des congrégations, c’est avec les
60 millions votés chaque année par les chambres pour le budget
des cultes, que le cléricalisme mène sa campagne incessante
contre les institutions laïques et démocratiques. Il s’agit
donc de poursuivre l’ennemi jusque ans son retranchement, d’une part par
la nationalisation des biens de mainmorte que nous vous demanderons ultérieurement,
et d’autre part par la suppression du budget des cultes, que nous vous
demandons aujourd’hui et sur laquelle nous invitons la majorité
républicaine de cette Chambre à se prononcer dès maintenant.
(Applaudissements à l’extrême gauche.)
………
M. le président du
conseil, ministre de l’intérieur et des cultes. L’honorable
M. Zévaès propose à la Chambre, purement et simplement,
la suppression du budget des cultes. Je lui répondrai ce qui a été
maintes fois répondu par mes prédécesseurs, que ce
n’est pas là une solution, et que personne n’a jamais admis qu’on
pût faire disparaître l’organisation actuelle qui garantit
l’exercice des cultes sans lui substituer autre chose. (Très
bien ! Très bien !)
Il a été également dit
maintes fois à cette tribune que cette question ne pouvait pas être
envisagée aussi longtemps que le problème des associations
n’aurait pas été résolu. Le Gouvernement a fait tous
ses efforts pour mettre la Chambre en mesure de voter une loi sur les associations,
loi qu’il considère comme capitale. Il considère, en effet,
que cette loi est une mesure urgente, une réforme qui s’impose et
que seule, elle peut être le préliminaire d’une délibération
portant aux autres questions.
Que conviendra-t-il de faire ? Quelle organisation
imaginer ? Ce sont là, messieurs, des questions sur lesquelles chaque
homme politique peut librement exprimer son opinion ; mais le devoir du
Gouvernement est, non pas d’exprimer des opinions, mais d’apporter des
solutions, et il ne doit ouvrir une question qu’autant qu’il est prêt
à la résoudre. (Très bien ! Très bien !)
……..
M. Alexandre Zévaès. M. le président
du conseil vient de déclarer que la question du budget des cultes
ne pourrait être utilement examiné qu’après la discussion
du projet de loi sur les associations.
M. Suchetet. Contre les associations
M. Alexandre Zévaès. Contre les associations
et congrégations religieuses, si vous voulez ; nous acceptons volontiers
la formule. (Très bien ! très bien ! à l’extrême
gauche. Applaudissements ironiques à droite), et si telle est
la pensée du Gouvernement, nous n’hésitons pas à déclarer
que telle est l’opinion du parti socialiste, dont je suis en ce moment
le représentant à cette tribune.
Mais puisque M. le président du conseil
estime que la question du budget des cultes ne saurait être sérieusement
discutée qu’après la question des associations, nous demandons
à la Chambre que ce budget soit réservé. ( Très
bien ! Très bien ! À l’extrême gauche)
M. le président du conseil, ministre de l’intérieur
et des cultes. Je n’ai pas besoin de dire que le Gouvernement repousse
formellement la motion de l’honorable M. Zévaès.
…………..