4 mai 1951
Proposition de résolution tendant à
inviter le Gouvernement à déposer devant l'Assemblée
algérienne un projet décision en vue de l'application en Algérie
du principe de la séparation du culte et de l'État, présentée
par M. Mokhtari, député. - (renvoyé à la commission
de l'intérieur,)
EXPOSE DES MOTIFS
Mesdames, messieurs, parmi les grands principes républicains,
il en est un qui est particulièrement sensible au cœur des hommes
et qui demande à être scrupuleusement respecté : celui
de la liberté du culte. C'est pourquoi, en 1947, la majorité
du Parlement comme le Gouvernement d'alors, faisait droit à une légitime
revendication de la population musulmane d'Algérie, avait inclu dans
le statut organique de ce pays un article ainsi conçu :
"Article 56. - L'indépendance du culte musulman
à l'égard de l'État est assuré, au même
titre que celle des autres cultes, dans le cadre de la loi du 9 décembre
1905 et du décret du 27 septembre 1907.
"L'application de ce principe, notamment en ce qui concerne
l'administration des biens habous, fera l'objet de décisions de l'assemblée
algérienne, rendues exécutoire selon la procédure instituée
aux articles 15 est 16 du présent statut.
Or, jusqu'à présent, c'est toujours l'administration
qui gère les biens habous et nomme les agents du culte musulman. Cette
situation parait d'autant plus incompréhensible que les deux autres
cultes existant en Algérie, le culte chrétien et le culte israélite,
jouissent, eux, d'une autonomie complète, la direction de leurs affaires
étant entre les mains d'un personnel désigné par eux.
Aussi, la. population musulmane est très choquée de cette différence
de traitement et l'interprète comme un signe de défiance ou
même comme une marque de brimade envers elle. Un de ses vœux les plus
chers est donc de voir l'administration des biens habous rendue aux cultuelles,
les agents du culte désignés par les fidèles et l'enseignement
de la langue arabe dispensé librement dans les mosquées.
En vertu du statut de l'Algérie, le pouvoir d'administration
est partagé entre le gouvernement général et l'assemblée
algérienne. Celle-ci se montrant réticente ou même hostile,
en raison de sa composition, à l'application du principe de la séparation
du culte et de l'État, il appartient au gouverneur général
représentant du Gouvernement de la République en Algérie,
de prendre l'initiative, en vue d'apaiser les esprits, de proposer les mesures
qui s'imposent et qui feront bénéficier sans plus tarder le
culte musulman d'une véritable indépendance à l'égard
de l'État.
Nous sommes convaincus que ces mesures dont l'effet sera
surtout moral et qui sont très attendues par la population musulmane,
auront d'heureuses répercussions dans les milieux progressistes d'Algérie
et de l'étranger.
C'est pourquoi nous vous demandons d'adopter la proposition
de résolution suivante :
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
L'Assemblée nationale invite le Gouvernement à
déposer devant l'assemblée algérienne un projet de décision
en vue de l'application en Algérie de l'article 56 de la loi n°
47-1859 du 20 septembre 1947 portant statut organique de l'Algérie.