Journal officiel du 5 février 1912
 

Ministère des colonies.
RAPPORT
AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

                    Paris, le 10 janvier 1912

            Monsieur le Président,
    Le décret du 6 février 1911 portant règlement d'administration publique et déterminant les conditions d'application à la Martinique, à 1a Guadeloupe et à la Réunion, des lois sur la séparation des Églises et de l'État et l'exercice public des cultes, dispose, on son article 43, que  les mesures propres à assurer l'exécution de ce décret seront déterminées par des règlements d'administration publique.
    Nous  avons préparé on conséquence le projet de décret ci-joint qui a été adopté par le conseil d'État, que nous avons l'honneur de soumettre à votre haute sanction et qui a pour but d'édicter les mesures d'exécution des dispositions de l'article 3, relatif aux inventaires, du décret susvisé du 6 février 1911.
    Nous vous prions d'agréer, monsieur le Président, l'hommage do notre profond respect.

            Le ministre des colonies
            A. LEBRUN.
            Le président du conseil, ministre de l'intérieur,
            J. CAILLAUX.
            Le ministre des finances
            L.-L. Klotz.
 

            Le Président de la République française,
    Sur le rapport du ministre des colonies, du ministre de l'intérieur et du ministre des finances,
    Vu le décret da 6 février 1911, déterminant les conditions d'application aux colonies des lois sur la séparation des Églises et de l'État et l'exercice public des cultes en ce qui concerne la Martinique, la Guadeloupe et la Réunion, et notamment les articles 3 et 43 ainsi conçus:
    " Art. 3. - Les établissements dont la suppression est ordonnée par l'article 2 continueront provisoirement de fonctionner, conformément aux dispositions qui les régissent actuellement jusqu'à l'attribution de leurs biens aux associations prévues par le titre IV et au plus tard jusqu'à l'expiration du délai ci-après :
    Dès la publication du présent décret, il sera procédé, par les agents du service du domaine, à l'inventaire descriptif et estimatif :
     1° Des biens mobiliers et immobiliers desdits établissements;
    2° Des biens des colonies et des communes dont les mêmes établissements ont la jouissance.
    Ce double inventaire sera dressé contradictoirement avec les représentants légaux des établissements ecclésiastiques ou eux dûment appelés par une notification faite en la forme administrative.
    Les agents chargés de l'inventaire auront le droit de se faire communiquer tous titres et documents utiles à leurs opérations.
    Les archives ecclésiastiques et les bibliothèques existant dans les évêchés, paroisses, succursales et leurs dépendances feront l'objet d'un inventaire spécial, celles qui seront reconnues propriétés des colonies ou des communes leur seront restituées.
    Art. 43. - Les mesures propres à assurer l'application du présent décret seront ultérieurement déterminées par des règlements d'administration publique. "

    Le conseil d'État entendu,

    Décrète:
    Art. 1er. - Le gouverneur, dans chaque colonie, désigne les agents du service du domaine chargés de l'inventaire prescrit par l'article 3 du décret da 6 février 1911.
    S'il y a lieu, il commissionne des agents auxiliaires lesquels sont choisis exclusivement parmi les fonctionnaires du service du Trésor.
    Art. 2. - Le chef du service du domaine, conformément aux instructions du gouverneur, fixe les jour et heure de l'ouverture des opérations et il en avise, au moyen d'une notification faite par les soins du gouverneur, dans la lorme administrative et cinq jours au moins à l'avance, savoir:
    1° Pour les fabriques des églises  l'évêque ou, en cas de vacance du siège, les vicaires généraux;
    2° Pour les menses épiscopales, l'évêque ou, en cas de vacance du siège, le commissaire administrateur;
    3° Pour les autres menses et pour les fabriques des églises et chapelles paroissiales, le desservant et le bureau des marguillers en la personne de son président;
    4° Pour les caisses de retraite et maisons de secours pour les prêtres âgés ou infirmes, le conseil d'administration en la personne de son président; 
    Avis des opérations est donné par les soins du gouverneur  aux représentants des communes qui pourront y assister.
    Art 3. - Indépendamment de la faculté qu'ont les membres des conseils administratifs ci-dessus désignés d'assister, à titre
individuel  , aux opérations de l'inventaire ces conseils peuvent s'y faire représenter par un ou plusieurs délégués pris parmi leurs
membres.
    En outre, les bureaux des marguilliers peuvent se faire représenter par un ou plusieurs des autres membres du conseil de
fabrique.
    Les  évêques peuvent se faire représenter par les vicaires généraux, les desservants  par un membre du conseil de fabrique.
    Art. 4. - Dans le cas où aucun des représentants d'un établissement ne se rend à la convocation  , il est passé outre par
l'agent du domaine qui procède alors en présence de deux témoins.
    Si l'agent rencontre un obstacle dans l'accomplissement de sa mission, il le constate et en réfère immédiatement par
l'intermédiaire du chef de service du domaine , au gouverneur, qui prescrit les mesures nécessaires.
      Art 5. - L inventaire est établi, tous droits et moyens des parties réservés.
    Il est rédigé en simple minute et sur papier non timbré.
    Il contient notamment:
    1° Les noms, qualités et demeures des comparants ;
    2° l'indication des lieux ou l'inventaire est fait;
    3° La description et l'estimation de tous les biens mobiliers et immobiliers inventoriés .
    4.° L'indication des deniers et valeurs en caisse ;
    5° La déclaration des titres actifs et passifs;
    6° La déclaration par les représentants de l'établissement, lors de la clôture des opérations, qu'à leur connaissance il n'existe
pas d'autres biens susceptibles d'être portés à l'inventaire, ou la mention du refus de cette déclaration.
    Les dires et protestations des intéressés au cours des opérations y sont consignés.
    Art. 6. - La partie descriptive et estimative de l'inventaire est divisée en deux chapitres:
    Le premier comprend les biens de toute nature qui appartiennent à l'établissement. S'ils proviennent de l'État ou de la colonie
mention est faite de cette origine ainsi que des fondations pieuses qui les grèvent et de la date de ces fondations. S'ils ont une
autre provenance l'inventaire indique les affectations de toute espèce dont ils peuvent être grevés,
    Le second chapitre est relatif aux biens de toute nature appartenant à la colonie ou à la commune et dont l'établissement n'a que la jouissance.
    Art. 7. - Après lecture l'inventaire est revêtu de la signature de l'agent du domaine et de celle des comparants ou des
témoins. En cas de refus de signature il en est fait mention.
    Art. 8. - Aussitôt après la clôture des opérations, l'inventaire est adressé par l'intermédiaire du chef du service du domaine au gouverneur, pour être déposé dans les archives du Gouvernement. Une copie conforme en est délivrée sans frais, par les soins du gouverneur au représentant légal de l'établissement, sans préjudice du droit des intéressés d'en prendre communication sur place et d'en obtenir une expédition dans les conditions du tarif légal.
    Art. 9. - Au cas où, après la clôture de l'inventaire, des biens qui n'y ont pas été portés viennent à être découverts, il est
dressé un supplément d'inventaire.
    Art. 10. - Le ministre des colonies, le ministre de l'intérieur et le ministre des finances sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera  publié au Journal officiel de la République et au Journaux officiels de la Martinique, de la Guadeloupe, et de la Réunion, et inséré au  Bulletin des lois et au Bulletin officiel du ministère des colonies.

        Fait à Paris le 10 janvier 1912
        A. FALLIERES.
            Par le Président de la République :
             Le ministre des colonies
            A. LEBRUN.
            Le président du conseil, ministre de l'intérieur,
            J. CAILLAUX.
            Le ministre des finances
            L.-L. Klotz.