Circulaire du ministre de l'Intérieur et des Cultes, aux préfets, du 19 août 1909,
Relative à l'affectation des objets du culte.
J'ai été informé qu'assez fréquemment des municipalités, après avoir décidé de faire droit à des revendications concernant des objets mobiliers placés dans les églises et ayant appartenu aux établissements ecclésiastiques supprimés, se sont vu opposer un refus par les revendiquants lorsque ces derniers étaient invités par elles à reprendre possession des objets dont ils s'étaient fait reconnaître propriétaires. Ceux-ci fonderaient leur prétention sur ce que ces objets, bien que leur étant restitués, demeureraient affectés au culte,
Il est incontestable que l'affectation au culte, qui grève légalement, en vertu des lois des 2 janvier 1907 et 13 avril 1908, les objets placés dans les édifices et appartenant aux communes, disparaît par le fait même de la décision qui fait droit à la demande en restitution. Une affectation de cette nature ne grève pas et ne peut grever un objet qui est redevenu la propriété d'un particulier. Et l'on doit reconnaître aussi qu'en droit strict les municipalités pourraient exiger que des objets qui ont cessé de leur appartenir fussent retirés de l'église, propriété communale, par leurs propriétaires ou aux frais de ceux-ci.
Mais il n'y a aucun avantage pour les communes à procéder ainsi. En entamant de nouvelles instances judiciaires, en vue de contraindre les propriétaires des objets cultuels dont il s'agit à les enlever ou de faire procéder pour leur compte à cet enlèvement, les municipalités paraissent devoir s'exposer à des difficultés et à des frais et froisser en même temps les sentiments de la généralité des fidèles.
Il est donc préférable à tous égards qu'elles se contentent d'adresser aux propriétaires intéressés, par exploit d'huissier ou par lettre recommandée, une mise en demeure d'avoir à procéder à l'enlèvement des objets revendiqués par eux, mise en demeure dans laquelle toute responsabilité de la commune serait déclinée quant à l'entretien, à la conservation et à la garde desdits objets. Cette manière de procéder semble devoir constituer pour les communes intéressées une garantie très suffisante pour l'avenir.
En se bornant à cela et en laissant les choses en l'état, dans le cas où la mise en demeure ne serait suivie d'aucun effet, les municipalités adopteront la solution de beaucoup la plus propre à assurer la paix publique et le respect de la liberté de conscience.
Vous voudrez bien vous inspirer des présentes instructions lorsque votre attention sera attirée sur des difficultés de la nature de celles que je viens de signaler. J'ajoute que vos arrêtés faisant droit à des demandes de restitution d'objets mobiliers placés dans les églises communales ne doivent en aucun cas contenir des injonctions prescrivant aux bénéficiaires de la restitution l3enlèvement de ces objets.