Circulaire du ministre des Cultes aux préfets,

du 21 janvier 1907,

Relative à la location des presbytères par les municipalités et

à la réglementation des sonneries de cloches à défaut d'associations cultuelles.


Comme suite à la circulaire télégraphique de M. le président du conseil du 17 courant et d'accord avec lui, je crois devoir vous transmettre certaines instructions complémentaires.

La loi du 2 janvier 1907 a décidé, par dérogation à la loi du 5 avril 1884, que les baux par lesquels les communes donneront en location les presbytères dont elles auront recouvré la libre disposition devront être soumis à votre approbation, même si leur durée ne dépasse pas dix-huit-ans, afin d'empêcher que des locations ne soient consenties à des ministres du culte moyennant un loyer dont l'insuffisance impliquerait une subvention indirecte au culte, interdite par l'article 2 de la loi du 9 décembre 1905. C'est le bail même et non pas seulement la délibération du conseil municipal en fixant les conditions, que vous êtes appelé à approuver.

Quant à la question de savoir si le loyer stipulé pour un presbytère désaffecté de plein droit en vertu de la loi de 1907 est ou non suffisant, elle ne saurait être tranchée par des règles fixes, et sa solution dépend, dans chaque espèce, des circonstances de fait. Je recommande néanmoins à votre attention les éléments suivants d'appréciation.

Vous devrez, en général, comparer le loyer avec la valeur locative servant de base à la contribution mobilière ; si le loyer est inférieur à cette valeur locative, vous aurez, sans déterminer si cependant il .a été convenablement fixé, à considérer le plus ou moins de facilités de location qu'offre le presbytère à raison de sa situation, de la disposition et de l'état des locaux ; vous rechercherez, d'autre part, si le loyer est proportionné aux dépenses laissées à la charge de la commune par bail, vous tiendrez également compte de la plus ou moins longue durée du bail ; et selon que cette durée dépassera ou non celle des pouvoirs du conseil municipal, vous vous montrerez, plus ou moins rigoureux dans l'estimation du chiffre minimum de loyer à exiger; enfin, vous aurez égard à l'état financier de la commune, aux ressources dont elle dispose et aux charges qui lui incombent, notamment en matière scolaire, et si elle néglige ou refuse de satisfaire auxdites charges, vous n'admettrez pas, à moins de motifs spéciaux, une atténuation de loyer de l'ancien presbytère.

Votre examen des baux relatifs aux presbytères se limitera aux clauses intéressant les finances des communes, et vous vous abstiendrez de discuter toutes autres énonciations des baux, notamment celles qui auraient trait à l'organisation ou à l'exercice du culte.

Vous veillerez à ce que les anciens occupants des immeubles rendus aux communes n'en conservent pas la jouissance gratuite sans bail ; cette jouissance ne peut leur être maintenue que dans les communes où elle a été réclamée par des associations cultuelles constituées dans l'année qui a suivi la promulgation de la loi du 9 décembre 1905. Dans toutes les autres communes, la continuation de la jouissance est subordonnée à la passation d'un bail comportant loyer. Si les ministres du culte refusent de prendre en location les immeubles communaux qu'ils occupaient ou si les communes refusent de leur louer ces immeubles, l'expulsion des occupants aura lieu à la requête des maires agissant au nom des communes et par voies judiciaires.

Les sonneries des cloches continueront à être soumises aux prescriptions de l'article 27, loi du 9 décembre 1905. Le deuxième paragraphe de cet article porte que les sonneries seront réglées par arrêté municipal et, en cas de désaccord entre le maire et l'association cultuelle, par arrêté préfectoral.

A défaut .d'association cultuelle pour succéder aux fabriques, cette hypothèse subsidiaire ne pouvant se réaliser, il appartiendra au maire de régler les sonneries conformément au droit commun, c'est-à-dire sous réserve des pouvoirs d'annulation, ou de suspension qui vous sont conférés par l'article 95 de la loi du 5 avril 1884.

Vous tiendrez la main — l'usage des cloches pour les sonneries religieuses étant consacré en principe par la loi, — à ce que la réglementation de ces sonneries n'aboutisse pas à leur suppression ou à leur réduction dans des conditions telles que la pratique de la religion se trouve entravée. Les sonneries civiles ne sont admissibles que dans les cas déterminés en exécution du troisième paragraphe de l'article 27 de la loi du 9 décembre 1905 et par l'article 51 du décret du 16 mars 1906. Les sonneries pour les baptêmes, mariages ou enterrements civils ne rentrent dans aucun de ces cas.